Revue de sociolinguistique en ligne | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
N°17 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Sommaire
ISSN : 1769-7425 |
Variétés et diffusion du français dans l'espace francophone à travers la chanson par Michaël Abecassis et Gudrun LedegenPeu de linguistes se sont intéressés
à la chanson en français et à ses usages langagiers. Cet
appel à contributions cherche à combler un vide, car même
si la chanson est copieusement citée comme référence dans
les journaux ou dans les manuels scolaires, elle n'est peut-être pas assez
considérée sérieusement par les chercheurs pour donner lieu
à des recherches approfondies. Le cinéma francophone où la chanson est omniprésente offre un champ privilégié d'analyses et cette dernière mériterait d'y être analysée du point de vue linguistique. Les comédies musicales, les interludes musicaux qui sont indissociables de l'image ou les thèmes musicaux chantés ont fait de certains films de véritables succès populaires. On peut citer par exemple les films d'avant-guerre mélangeant à l'aube du cinéma parlant, le muet, le parlant et le chanté comme Sous les toits de Paris de René Clair ou Pépé le Moko de Julien Duvivier avec d'anciennes stars du music-hall comme Fréhel et Jean Gabin. Dans les films des années 30-40, la musique était utilisée par des metteurs en scène comme Renoir, Carné ou Duvivier comme un moteur indispensable au film et la plupart du temps elle véhicule un message ou une morale : la chanson tient un rôle tout aussi important dans le cinéma contemporain où elle s'intègre dans la bande-sonore. Elle possède toujours une valeur esthétique et idéologique comme dans certains films musicaux (on pourrait citer Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy ou encore On connaît la chanson d'Alain Resnais). Le cinéma français n'est pas le seul à faire grand usage de la musique. Le cinéma africain, par exemple, puise très souvent dans le registre musical inspiré de la culture populaire (contes, paroles, chants) pour communiquer au spectateur/auditeur les émotions ressenties par ses personnages. Notons également que la musique est l'une des composantes de l'anthropologie visuelle. Les danses et les chants accompagnent bon nombre de documents de Jean Rouch et font l'objet d'études ethnographiques et anthropologiques. Ce numéro de Glottopol se propose d'élargir la réflexion en traitant de l'utilisation qui est faite en didactique de la chanson. Partout dans le monde, la chanson en langue française est utilisée dans l'apprentissage du français aussi bien dans les écoles qu'à l'université : l'enseignant peut la mettre à son service pour illustrer aussi bien des différences de registre et des variations, que des questions lexicales ou grammaticales. Dans les manuels scolaires figurent, souvent pour la qualité des textes, des extraits de chansons appartenant à différents genres de Jacques Brel, à MCSolaar ou Bénabar en passant par les incontournables Georges Brassens et Boris Vian. La chanson est perçue a priori comme distrayante et ludique, ce qui en fait un corpus atypique. Est-ce justement cet aspect ludique et oral qui la dévaloriserait, ou la déclasserait par rapport à un texte écrit jugé plus littéraire ? Plus que l'oralité, c'est l'association à la musique qui pose problème : le terme de chanson est une forme d'expression populaire au XVIIIe-XIXe siècle, mais un peu comme les littératures populaires qu'on a longtemps méprisées ce genre est maintenant étudié par la critique. Ce recueil d'articles regroupe des analyses linguistiques, sociolinguistiques et didactiques qui s'intéressent à la chanson en français, aussi bien dans la Métropole que dans tout l'espace francophone. Les auteurs se focalisent par exemple sur un corpus de chansons en français à une époque donnée, ou suivent les usages langagiers d'une manière diachronique. Toutes les formes musicales, que ce soient les comptines, la chanson populaire, la chanson rap, ou la "nouvelle chanson à texte", ont eu un impact sur les pratiques langagières de notre société et il s'agit de déterminer dans quelle mesure celles-ci ont pu influencer la langue française et nourrir notre imaginaire collectif. Les études phonologiques ou lexicographiques sur le français parlé menées par Paul Passy, Charles Nisard et Henri Bauche constituent le témoignage de l'existence, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, d'un vernaculaire à part entière, associé à la classe prolétaire et tout particulièrement à la petite mafia parisienne. De ces voix d'autrefois, il ne subsiste que de rares traces sonores, pour la plupart conservées dans les archives de la Bibliothèque Nationale à Paris et qui ont donné lieu à très peu d'études. Michaël Abecassis se propose de reconstituer, à travers ces enregistrements épars de cris de la rue, de films et de chansons des années 30, les traits caractéristiques de ce que l'on appelait communément et péjorativement jusqu'à la fin des années 60 le 'français populaire', et d'en évaluer la vitalité dans le Paris d'aujourd'hui. Les
locutrices qui font l'objet de l'article de Sofiane Bengoua utilisent la comptine,
dans les situations informelles et en dehors de toute contrainte officielle en
l'occurrence l'école. En chantant, les locutrices (filles) utilisent l'arabe
algérien et le français standard spontanément. C'est l'impact
de cet usage alterné et l'analyse des variables qui affectent les aspects
phonétiques, lexicaux et morphosyntaxiques de la comptine qui sont au centre
de la présente étude. Quels sont les différents facteurs
variationnels qui influencent l'usage du français standard dans la comptine ?
Pouvons-nous parler d'un usage de français contextuel ? L'article
d'Adeline Nguefak s'intéresse à l'aspect linguistique de la production
chansonnière. S'appuyant sur un corpus écrit par les chansonniers
de presque toutes les régions du Cameroun, son étude décrit
des choix langagiers en uvre dans les textes et rend compte de leurs manifestations
possibles et particulièrement du jeu de négociation de nouvelles
identités dans un milieu multiculturel et plurilingue. Pour aborder une page d'histoire française telle que La
Révolution de 1789, déterminante pour comprendre la France contemporaine,
dans un cours de culture française (Français langue seconde, étudiants
canadiens de Nouvelle Ecosse, niveau intermédiaire avancé) quoi
de plus original que de partir de l'hymne national, La Marseillaise comme
le suggère l'article de Joëlle Cauville : sa création, sa signification,
son influence et ses variantes à la fois engagées et humoristiques ?
Quoi de plus stimulant que de le comparer à d'autres hymnes nationaux ?
Fortement sollicitée en classe de langue, la chanson semble pourtant être pour Marine Totozani l'apanage des publics de niveau avancé et n'est administrée qu'à de faibles doses aux niveaux inférieurs. En revisitant les répertoires de chansons proposées pour être utilisées en classe de FLE, elle a remarqué que leur exploitation pédagogique ne tire pas efficacement avantage des compétences plurilingues et pluriculturelles des apprenants, ce qui serait souhaitable, surtout dans les débuts d'apprentissage d'une langue étrangère. L'auteur oriente son attention tout particulièrement vers la chanson plurilingue. Reflet des mutations réalisées au sein des sociétés et des modifications au niveau des relations entre les Etats, les langues et les citoyens, l'émergence de la chanson plurilingue dans le paysage de la chanson francophone n'est plus à prouver. Amy J. Ransom conclut ce numéro sur la chanson. Son analyse d'un échantillon de chansons québécoises, diffusées sur une station de radio satellite, entre les mois de mai 2008 et décembre 2009, révèle une grande variété dans les choix de langue et de changements de code fréquents entre les diverses langues et leurs registres. Cette facilité langagière reflète non pas seulement la réalité quotidienne de l'omniprésence de l'anglais pour le francophone du Québec, mais aussi l'élargissement et la polyvalence de l'identité québécoise à l'heure actuelle. Nous tenons à remercier pour leur aimable participation à l'élaboration de ce numéro : Salih Akin (Rouen), Jacqueline Billiez (Grenoble), Karine Blanchon (Paris), Joëlle Gardes-Tamine (Paris 4), Jeanne Gonac'h (Rouen), Amélie Hien (Université Laurentienne, Canada), Cristina Johnston (Stirling), Germain Lacasse (Montréal), Emmanuelle Labeau (Aston), Laure Lansari (Reims-Champagne Ardenne), Emilie Née (Paris 3), Ambroise Queffélec (Université de Provence), Gwenn Scheppler (Montréal), Cyril Trimaille (Grenoble). Sommaire
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Résumés
The phonological or lexicographical studies into spoken French carried out by Paul Passy, Charles Nisard and Henri Bauche are evidence of the existence, at the end of the nineteenth century and at the beginning of the twentieth, of a fully-fledged vernacular, associated with the proletariat and specifically with the small Parisian mafia. The remnants of these past voices are rare and echoing, and mostly preserved in the archives of the Bibliothèque Nationale in Paris where they have been of little academic inspiration. This article aims to piece together the basic components of French song. From the scattered recordings of street talk, alongside films and songs from the thirties, it will establish the characteristic features of that which we commonly and pejoratively until the end of the sixties called 'popular French'. From there, it will analyse the resonance of that language in 21st Century Paris. Mots clés : Popular music, vernacular, Paris, cinema, street vendors' cries, sociolinguistics
Les locutrices de nos deux zones d'enquête chantent des comptines spécifiques au contexte plurilingue. Nous nous intéresserons, dans ce papier, aux variables qui affectent les aspects phonétiques, lexicaux et morphosyntaxiques de ces comptines. Pour se faire, nous devons répondre à deux interrogations majeures : Quels sont les différents facteurs variationnels qui influencent l'usage du français standard dans la comptine ? Pourrions-nous parler d'un usage de français contextuel ? Mots clés : comptines, usage du français, facteurs variationnels, français contextuel
L'arabe algérien
s'est enrichi, surtout, grâce au contact avec les langues en présence,
l'espagnol, le turc, le français etc. L'emprunt au français a permis
aux locuteurs algériens de créer des formules langagières
nouvelles, qui se concrétisent, le plus souvent, à travers les expressions
artistiques, dont la chanson rap est un exemple. Mots clés :
Emprunt, français, arabe algérien, chanson rap, créativité
langagière.
Cet article s'intéresse à l'aspect linguistique de la production chansonnière. S'appuyant sur un corpus écrit par les chansonniers de presque toutes les régions du Cameroun, cette étude décrit des choix langagiers en uvre dans les textes et rend compte de leurs manifestations possibles et particulièrement du jeu de négociation de nouvelles identités dans un milieu multiculturel et plurilingue. Mots clés : Chanson camerounaise, langue populaire, appropriation du français, nouvelles identités linguistiques, dialogue interculturel.
La Côte d'Ivoire s'est taillé une certaine réputation pour son français, et de fait, à côté des langues nationales ivoiriennes coexistent plusieurs variétés de français. Les textes des chansons ivoiriennes attestent de cette dynamique du français, en s'inspirant de l'environnement aussi bien linguistique que culturel des Ivoiriens. Ce constat amène alors à s'interroger sur la place et les rôles de la chanson ivoirienne, dans la dynamique non seulement linguistique, mais également sociale de la Côte d'Ivoire. Mots clés : Côte
d'Ivoire, chanson, dynamique linguistique et sociale, Français Populaire
Ivoirien, nouchi, stratégies identitaires.
La Marseillaise, l'hymne national français est à la fois une chanson de circonstances et une uvre porteuse de thèmes éternels. Elle se révèle un outil pédagogique efficace en cours de culture française (FLE), car, en plus de présenter une page d'histoire essentielle à la naissance de la France moderne, elle dépasse le cadre national dans son rôle de chant de ralliement, lors de conflits mondiaux. Enfin, ses parodies et ses variantes permettent d'apprécier l'humour de l'esprit gaulois. Mots clés : Marseillaise, hymne national, parodie, humour, enseignement universitaire
La chanson est souvent, en FLE, un support d'appoint qui a tendance à être dévalorisé. Cet article présente deux expériences menées à l'IEFE de Montpellier. La première concerne un cours optionnel intitulé "Littérature et chanson française" qui vise à aborder le texte de chanson sur les mêmes bases que le texte littéraire. La seconde porte sur l'utilisation du laboratoire multimédia pour appréhender la chanson française d'une manière innovante. Dans les deux cas, les pratiques pédagogiques permettent de faire émerger une nouvelle image de la chanson. Mots clés : chanson, support pédagogique, IEFE, littérature, multimédia, représentations sociales, didactique du FLE, compréhension de l'oral
C'est une approche didactique de la chanson qui est privilégiée ici. De plus en plus sollicitée en classe de langue, la chanson ne semble pourtant pas facilement accessible à tout public. C'est ce qui apparaît à travers l'étude d'un corpus de fiches pédagogiques de chansons recueillies sur le site Le plaisir d'apprendre du Cavilam. En se proposant de "rapprocher" niveau débutant et chanson, le présent article se penche sur un type particulier de chanson - celle plurilingue - tout en prenant le soin de suggérer un mode d'emploi susceptible d'être particulièrement propice au niveau en question. Mots clés : Chanson plurilingue, compétence plurilingue et pluriculturelle, CECR, niveau A1 du CECR, Evlang.
Examining a body of songs aired on the satellite radio station Air Musique from May 2008 to December 2009, this essay discusses the language choices of a wide array of Québec's popular music writers and performers. Within the context of a language ideology which stresses the importance of French, la chanson québécoise reveals a surprising fluidity in its choice of language and register, including Standard International French, Standard Québec French, and Vernacular Québec French. While the frequent presence of English, either through code switching or through appropriations incorporated into Vernacular Québec French might be surprising, this appears consistent with the hybrid nature of Québec's popular music, deriving both from a metropolitan French chanson tradition and Anglo-American rock/pop. The diversity of the corpus, both linguistically and musically, reveals the maturity of Québec's contemporary music scene and its ability to accept as authentically Québécois a wide range of practices. Mots clés : Popular music; Québec; code switching; music and regional/national identity; sociolinguistics
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