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Revue de sociolinguistique
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ISSN : 1769-7425

 

 

Numéro 37 : Migration(s) multiple(s). Reconfigurations des répertoires sociolinguistiques et perpectives éducatives -- appel clos
Conseils aux auteurs

 

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Numéro 38

Altera lingua ou la construction sociale de l'altérité linguistique

Numéro coordonné par Elatiana Razafimandimbimanana, Gail Prasad

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Argumentaire

Les discours, récits, imaginaires et tensions au sujet de l'alterité cristallisent les préoccupations d’une grande partie des "collectivités historiques" (Schnapper, 1998) et, en miroir de cela, les chercheur.e.s en sciences sociales (Jodelet, 2005 : 24) y consacrent tout un empan de concepts[ 1 ]. La prise en compte de l’altérité sociale semble même être au fondement de la science dite engagée, activiste ou transformative [ 2] (Schneidewind et al., 2016 : 6). La question de l’altérité nous situe ainsi à la croisée de la critique scientifique et de l’agir social. Qu’en est-il plus spécifiquement de l’altérité linguistique ?
Cet appel propose l’expression altera lingua pour désigner la multitude des phénomènes de « mise en altérité » (Jodelet, 2005 : 23 ; 1989) à travers lesquels la langue [ 3], les langues et leurs variations peuvent être mobilisées, instrumentalisées, institutionnalisées, sacralisées, interdites. À travers cette expression peu usitée, le motif est aussi de :

  • susciter un temps d’arrêt, un questionnement sur ses propres certitudes (représentations, catégorisations, imaginaires) qui peut favoriser la rencontre avec l’autre ;
  • permettre des postures intellectuelles humbles [ 4] au sens de pensées nuancées par la reconnaissance et l’écoute d’expériences altéritaires (Levinas, 1976 ; Lamarre, 2006) ;
  • proposer aux contributeur·rice·s un espace sémantique relativement ouvert dans la mesure où l’expression altera lingua est moins documentée par rapport à d’autres, telle que l’altérité linguistique (cf. Busch, 2017 ; Choi & Slaughter, 2021 ; Farmer & Prasad, 2014 ; Goï, 2013 ; Goï et al. 2014 ; Prasad, 2017 ; Purkarthofer, 2018).

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Chaque auteur·e pourra diversement s’en saisir pour narrer, interroger, analyser autrement la question de l’altérité linguistique.
Le point de départ de cet appel pourrait se formuler comme suit : « L’altérité se construit plus qu’elle ne se découvre » (Baudrillard & Guillaume, 1994 : 52). Qu’il s’agisse de prendre en compte la portée des mots lorsqu’ils sont reçus comme des assignations [5 ] à être « l’autre », d’interroger la place des langues dans la construction de l’altérité en société ou encore d’étudier les représentations sociales des langues qui découlent d’idéologies altéritaires, il est effectivement admis que l’altérité n’est pas un allant de soi. Elle est plutôt à concevoir en tant que produit d’une construction sociale (Berger et Luckmann, 1966).
Partant de là, l’objectif est d’adopter une approche sociale des langues (ex. Labov, 1976 ; Boutet, 1980 ; Gee, 1996 ; Halliday, 1997 ; Calvet, 2013 ; Street 1984, 2011, 2013) et de prendre position en tant que chercheur·e·s et êtres « langagier·ère·s » (Flores, 2013). Nous situons-nous dans une ère post-multilingue (Wei, 2016) et quelles en seraient les incidences sur nous et nos expériences plurilingues ? Quels récits (scientifiques, historiques, politiques, institutionnels, etc.) sur « l’autre » nous dérangent ? Que nous inspire l’amplification récente [ 6] de mouvements tels que la « dé-binarisation », la « décolonialisation », la « dé-racialisation », « l’écriture inclusive », la culture « woke » ou encore l’« intersectionnalité » ? La discrimination sur la base de traits langagiers est à la fois un fait connu (« linguicisme », Skutnabb-Kangas, 1986), ordinaire (« glottophobie », Blanchet, 2016) et insidieux (« micro-agressions linguistiques », Razafimandimbimanana et Wacalie, 2019 et 2020). Que peuvent y faire des chercheur·e·s engagé·e·s ?

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Quelques angles de questionnements sont proposés ci-dessous sans pour autant restreindre le champ des possibles. Ils ont pour thématique transversale la construction sociale de l’altérité linguistique et pour visée commune la pluralisation de notre capacité à imaginer, à dire, à représenter, à problématiser et à comprendre les processus d’altérisation via le langagier. Nous invitons les contributeur·rice·s à librement s’en inspirer, y compris pour s’en éloigner. Les pistes suivantes invitent à imaginer de nouvelles possibilités de résistance à l’assignation identitaire.


Qu’implique l’altera lingua ?
Comment renouveler la question de l’altérité linguistique afin que des expériences minoritaires soient (plus) visibles ? Ce premier axe s’intéresse aux sens qui peuvent être donnés, de façon heuristique, collaborative et subjectivée, à un concept qui n’a pas encore de littérature attitrée : altera lingua. De qui parle-t-on lorsqu’une frontière linguistique est tracée entre soi et les autres ? De qui ne parle-t-on pas (encore) ? Pourquoi ? Comment cette frontière devient-elle une barrière structurelle (Cummins, 2003) ? Peut-on la dépasser et quelles en sont les conséquences ? Que faire de ses propres frontières ? Compte tenu de la non-neutralité des choix terminologiques des chercheur·e·s, la gêne expliquée face au terme « allophone » en est un exemple parmi d’autres (Prasad, 2012 ; Razafimandimbimanana et Traisnel, 2017 ; Marchadour, 2019), quelles appellations défend-t-on pour parler de « l’autre langagier » ? Quelles sont les formes d’intersectionnalité avec d’autres catégorisations sociales ? Quelles sont les principales manifestations de l’altera lingua et que nous disent-elles des sociétés en question ? 

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Figures de l’altera lingua
L’autre est à (ré)imaginer dans la mesure où :
« la capacité humaine à blesser les autres a toujours été bien plus grande que sa capacité à imaginer les autres. Ou peut-être devrions-nous dire : “La capacité humaine à blesser les autres est très grande précisément parce que notre capacité à imaginer les autres est très petite” » (Scarry, 2003 : 102).
En contraste avec l’expérience empirique, comment imagine-t-on l’altérité linguistique ? Autour de nous, les imaginaires institutants (Castoriadis, 1975) de l’altérité linguistique créent des représentations aussi iconiques et glotto-stéréotypées (Bochmann, 2001) que chargées d’éloges de la différenciation. Les exemples suivants sont devenus des classiques dans les figures de l’altérité : le mythe des (hyper[7 ]) polyglottes surhumain·e·s (Erard, 2012 : 82 ; 220) ; le cliché de l’accent qui serait le propre de l’allochtone, plus communément appelé·e l’étranger·ère(Boyer, 2015) ; la mise en correspondance entre allophonies et difficultés scolaires (Klinkenberg, 2015 : 25 ; Armagnague-Roucher & Rigoni, 2016 : 346 ; Flores & Rosa, 2015 ; Rosa & Flores, 2017 ; Rosa, 2019). Toutes ces figures découlent d’une conception certaine de la langue, utilisée et acceptée comme filtre social. Les phénomènes multiples associés à l’altera lingua concernent aussi les volontés de féminisation, pour la « parité linguistique » (Baider et al., 2007) et contre un système patriarcal ou sexiste (Khaznadar, 2015). Qui incarne ces figures ou comment les imagine-t-on ? Quelles peurs suscite l’écriture inclusive (Abbou et al., 2018) ? Inversement, quelles réactions la masculinisation (cf. Viennot, 2014) génère-t-elle ? En quelque sorte, comment se revendiquent et s’organisent les altérités imaginées ?

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La construction des « réalités » de l’altera lingua
Les conceptions de l’autre sont à pluraliser. Chaque discipline scientifique, les institutions, les médias, les arts, la fiction et plus largement le monde du divertissement participent aussi, si ce n’est à les instituer en tant que « vérités » du moins à relayer la « réalité » d’altérités linguistiques. Quelles sont les caractéristiques des altérités linguistiques dont témoignent ces espaces, discours, représentations, systèmes, idéologies ? Qu’en est-il des modalités de construction dans les récits historiques et sur le temps long ? Étant entendu que « l’autre » peut résulter d’une hétéro-assignation (« tu n’es pas comme moi[ 8] ») ou d’une auto-assignation (« je ne suis pas comme toi »), en quoi les altérités linguistiques font-elles l’objet d’un surinvestissement ? Pour qui paraissent-elles surinvesties ? Dans un souci de pluralisation des voix et des savoirs, qu’en disent les personnes qui, d’une volonté personnelle, incarnent l’altera lingua ? À cet effet, les contributions peuvent prendre la forme d’entretiens, de rencontres, de portraits permettant d’entrer dans l’intimité des expériences qui revendiquent l’altérité linguistique. Étant entendu que « Les mots ne sont pas seulement des instruments de la discussion universitaire et politique, ils en sont les objets » (Schnapper, 1993 : 157), comment ceux·celles qui incarnent l’altera lingua se désignent-il·elle·s? Que font-il·elle·s des modes de désignation, voire d’assujettissement d’autrui ?

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Les enjeux de l’altera lingua dans les rapports aux savoirs
L’autre et le savoir. Rhétorique (Kristeva, 1989), figure imaginée et imagée, « réalité » diffusée, l’altera lingua soulève aussi la question de l’effacement (Meschonnic, 1999) et des conditions de reconnaissance (Honneth, 2000). Appliquée aux terrains scolaires, éducatifs, formatifs, professionnels, cette question permet de relier rapports sociaux aux autres et rapports aux savoirs. Les enjeux sociaux sont importants sachant que l’accès aux savoirs est notamment conditionné par : le sentiment d’appartenance, l’identification au « modèle savant » et par les possibilités de projection dans l’espace pédagogique (Bandura, 1977; Cummins, 2003). Les contributions peuvent aussi s’intéresser à l’observation des dynamiques altéritaires en situation institutionnelle, à l’analyse de politiques éducatives, aux partages d’expériences pédagogiques ou encore aux études critiques de postures évaluatives. Il peut également s’agir de regarder comment l’altera lingua, construit social, devient une source de savoirs institutionnels autour des langues autres, des langues de l’autre, de l’autre langue : « celle que l’on parle d’un lieu politiquement et idéologiquement inhabitable : le lieu de l’interstice, du bord, de l’écharpe, du boitement : lieu cavalier puisqu’il traverse, chevauche, panoramise et offense. » (Barthes, 1970).

En somme, cet appel vise à créer un espace d’écoute et de rencontres avec des formes d’altérité linguistique. Il s’inscrit aussi dans ce que Mignolo et Tlostanova (2006) appellent « les géopolitiques et politiques corporelles du savoir ». Ainsi, quels savoirs se construisent à partir d’expériences vécues en tant que « corps minorisés » dus à des conceptions idéologiques, racialisées, linguistiques, sexuées, religieuses, etc. ? À partir de quelles frontières et de quels récits ces savoirs sont-ils érigés au statut de « théories » et en quoi éclairent-ils les idéologies dominantes ? Il serait également intéressant de voir comment les savsoirs et théories permettent de critiquer voire de transformer (Siebers, 2013) ces idéologies dominantes. 
Quel que soit l’angle adopté, les contributions peuvent privilégier des démarches décloisonnées, collaboratives et interprofessionnelles pour donner à voir les phénomènes de l’altera lingua à l’aulne des rencontres qui (dés)enchantent les sujets chercheur·e·s.

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Notes


1 Par exemple : exotisation, orientalisme, empathie, l’école inclusive, inégalités sociales, modes de discrimination, rapports de genre, gestion du vivre-ensemble.

2 Une conception de la science comme étant un champ « dont le travail ne se limite pas seulement à l’observation et à la description des processus de transformation sociétaux, mais qui en est l’initiateur et le catalyseur. La science transformative a pour objectif de contribuer à une meilleure compréhension des processus de transformation tout en visant à consolider notre capacité à (re)penser ces processus. » [traduction libre de notre fait] (Schneidewind et al., 2016 : 6). 

3 Au sens inclusif : système linguistique, variété de langue, pratique langagière, répertoire plurilingue.

4 Moins au sens d’une vertu religieuse qu’au sens de la nuance et de la conscience de sa nécessité pour « rencontrer » l’autre, se repenser à travers lui et nourrir sa pensée (auto)critique avec lui.

5 Non exclusivement négatives.

6 Ou du moins, le sentiment de cela en nous référant aux espaces institutionnels (France hexagonale, Nouvelle-Calédonie, Canada, États-Unis) dans lesquels nous sommes inscrites au titre de membres et d’observatrices.

7 La popularisation du terme « hyperpolyglotte » est attribuée à Richard Hudson en 2003. URL : [https://dickhudson.com/hyperpolyglots/], consulté le 22.02.21. Hudson définit le·la polyglotte comme maitrisant au moins six langues.

8 Le singulier est utilisé à des fins de commodité.

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Calendrier de publication

Date limite de réception des contributions : 15 septembre 2022 (prolongation)
Envoi des contributions à : elatiana@gmail.com, glprasad@edu.yorku.ca, glottopol@gmail.com
Consignes pour la remise des textes : voir ci-dessous
Parution : 2023

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Numéro 37

Migration(s) multiple(s). Reconfigurations des répertoires sociolinguistiques et perspectives éducatives

Numéro coordonné par Marine Totozani et Valeria Villa-Perez

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Argumentaire

Si la migration est un phénomène inhérent à l’humanité, ce sont ses manifestations « récentes », accentuées par une complexification des flux migratoires, que cet appel à contributions souhaite interroger. Plus concrètement, il s’agit de se pencher sur des mouvements migratoires dynamiques, comportant plusieurs étapes et se produisant souvent après un séjour « prolongé » dans un premier pays d’accueil (ou de transit), afin de les étudier à l’aune de la sociolinguistique et de la didactique des langues.  

En France, les recherches sur les migrations dans ces deux champs peuvent déjà se prévaloir d’un important héritage inauguré avec l’école grenobloise depuis plus de trois décennies (Billiez, 1979 ; Dabène, 1981) et suivi d’une vaste production scientifique dont C. Canut et M. Guellouz (2018) proposent un état des lieux en introduction du numéro 30 de la revue Langage et société. Dans le cadre de ces recherches, pour problématiser la multiplicité des trajectoires migratoires et langagières, C. Deprez emploie la notion de « circulation ». Cette dernière permet de considérer « l’espace mis en jeu dans l’immigration [non] plus de façon linéaire, avec aux extrémités deux points statiques et opposés entre pays d’accueil et pays d’origine mais bien comme une circulation […] entre ces deux pôles (voire plus), où transitent des personnes, mais aussi […] des modèles culturels » (Deprez, 2006 : 119-120). Issue des travaux de Tarrius (1992), la notion de circulation migratoire est intéressante dans la mesure où elle a été investie par les sciences humaines et sociales pour décrire et analyser les phénomènes liés à la mondialisation (Lessault, Berthomiere, 2019 : 22).

 

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Tout en se situant dans ce sillage, la thématique du numéro que nous proposons se veut en même temps une ouverture sur une situation relativement récente : la migration multiple. De ce fait, en sociologie, le focus est déplacé de l’immigration à l’émigration d’un pays à un autre, voire plusieurs, et cela va au-delà des problématiques concernant les migrations dites de retour pour se concentrer sur les remigrations (Héran, 2018). En faisant évoluer les représentations traditionnelles sur la migration d’un pays d’origine à un pays de destination, les recherches en question mettent en lumière des parcours de vie pluridirectionnels (cf. Beauchemin, 2015). Ainsi, la migration multiple est décrite comme l’itinéraire « d’un pays européen vers un autre par un processus comportant deux étapes ou plus » (Toma, Castagnone, 2015 : 70) dont « les facteurs qui déterminent les trajectoires de migrations individuelles restent pourtant mal connus » (ibid.).

 

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Des acteurs plus ou moins structurés mettent en oeuvre des glottopolitiques engagées et/ou solidaires : des locuteurs individuels, des organisations (collectifs de bénévoles, de militants, associations), des membres d'institutions étatiques qui sortent de leurs cadres ; des réseaux communautaires ou non (foyers de migrants, groupes autochtones, etc.) se mobilisent autour de la question des langues, de leur enseignement-apprentissage, de leur survie, et des modalités de leur transmission ou de leur revitalisation. Les propositions pourront porter sur des études empiriques, dans des contextes situés (situations (néo) coloniales, transfrontalières, de mobilité ou de minorisation). Elles pourront aussi privilégier une dimension épistémologique relative aux notions de glottopolitique, de bénévolat, d'assistance, de solidarité et de revitalisation et interroger ce que recouvre la notion d'acteur : Qui sont-ils ? Comment s'organisent-ils ? Se revendiquent-ils toujours d'un même groupe ? Ont-ils le même projet ?

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Néanmoins la dimension (socio)linguistique et didactique est lacunaire dans ce domaine et mérite réflexion. En France, pays qui depuis plusieurs années représente l’une des étapes d’une migration triangulaire d’individus ou de familles originaires du Maghreb (mais pas seulement) ayant résidé par exemple en Italie (Villa-Perez, 2017 ; Totozani, 2018a), la question commence à attirer de plus en plus l’attention des chercheur.e.s. Ces travaux mettent en évidence les trajectoires intra-européennes de migrants en plurimobilité (Azzara, Villa-Perez, 2020) provenant originairement de pays tiers. La France est aussi au centre de l’itinéraire de migrants venant d’Espagne. Le cas français est donc un exemple parlant d’une nouvelle réalité migratoire répandue au niveau européen. Ce qui rend possibles les migrations répétées est d’une part la possession d’un passeport d’un pays appartenant à l’UE (cf. De Hoon, Vink, Schmeets, 2019), obtenu lors d’une première migration, qui facilite la circulation intraeuropéenne. D’autre part, au-delà des raisons linguistiques, cela renvoie à des « compétences sociales », à « un savoir-circuler » (Lessault, Berthomiere, 2019 : 39), à la présence d’un réseau familial et/ou amical (Beauchemin, 2015), dans le troisième, voire le quatrième pays d’installation qui semble être un facteur déterminant à la base d’un autre projet migratoire. En guise d’exemples, ces mêmes mouvements s’observent en Suisse ou au Luxembourg où de nombreux Brésiliens et Capverdiens s’installent après avoir vécu au Portugal ou ailleurs en Europe( 1 ). La Grande-Bretagne est aussi concernée : elle est devenue une étape migratoire des Italo-Bengalais (Della Puppa, King, 2019) ou des Italo-Nigériens (Goglia, 2020).
Mais l’Europe n’est pas un contexte exclusif des migrations multiples qui s’observent aussi à l’échelle d’autres continents : entre l’Algérie, la France et le Canada (Thamin, Ali-Bencherif, Calinon, 2019), en Asie, en Océanie… De ce fait, les contributions attendues peuvent concerner également des aires géographiques en dehors de l’Europe et d’autres langues que le français.

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Les dimensions sociolinguistiques et didactiques précisées plus haut nous conduisent à privilégier des articles à propos de :

  • la reconfiguration du répertoire linguistique des locuteurs : comment les répertoires des locuteurs se restructurent-ils autour de et en contact avec le français ou d’autres langues ? Quels phénomènes d’hybridation linguistique, les circulations migratoires entrainent-elles (entre les langues dites d’origine et/ou d’héritage et la/les langues du nouveau pays d’accueil et inversement) ? Quelles langues sont (re)transmises et avec quelles conséquences sur les politiques linguistiques familiales ? En outre, quelles traces reste-t-il de la/des langue/s (minorées) (Villa-Perez, à paraitre 2021) ou variétés des pays de transit dans le répertoire des migrants ?
  • l’aspect idéologique ou représentationnel : au-delà des langues, quelles circulations idéologiques (rapports à la norme et/ou à la variation, à la variation genrée, aux langues minorées, aux langues de l’écrit, aux langues littéraires, aux langues religieuses…) les migrations multiples engendrent-elles ?

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  • la dimension épistémologique : des questionnements sur les notions employées pour définir des parcours migratoires réversibles (circulation migratoire, migration multiple, double migration, migration subséquente ou successive, remigration, plurimobilité…) pour les dire et les étudier. Comment qualifier les langues faisant partie du répertoire des locuteurs (Calvet, 2016) en plurimobilité : langues « déterritorialisées » (Vermes, 1988), langues « immigrées », « de/en diaspora », « d’origine », « d’héritage » (cf. Matthey, 2017) … ?
  • le milieu éducatif : en interrogeant les manifestations linguistiques complexes des phénomènes migratoires dans les nouvelles sociétés d’accueil et/ou de transit, ce numéro a aussi pour but d’éclairer l’inclusion scolaire et/ou universitaire des migrants, les inégalités potentielles et les langues associées à leurs parcours (langues minorées et/ou régionales comprises). Si l’école est un des lieux privilégiés pour observer des phénomènes langagiers divers et hétérogènes relatifs aux migrations multiples, l’université reste quant à elle moins investie par les travaux sur l’intégration des étudiant.e.s « migrants » (les études étant davantage concentrées sur les étudiants internationaux ou Erasmus). Tout cela implique une réflexion sur la construction des savoirs (linguistiques et autres), sur les actions en classe, sur les expériences éducatives et d’apprentissage déjà-là des apprenant.e.s (Leconte, Mortamet, à paraitre), les gestes professionnels et postures des enseignant.e.s favorisant l’inclusion des élèves en situation de plurimobilité (Totozani, Tomc, Lapique, 2017 ; Totozani, 2018b).
  • Les apprentissages formels et informels, dont la formation linguistique des migrants (Adami, 2009 ; Beacco, 2017), en plurimobilité : quelle prise en compte des répertoires plurilingues (Azzara, Villa-Perez, 2020) ?
  • La formation initiale et continue des enseignant.e.s de/en langue/s et la résonance de tels phénomènes sur l’adaptabilité et réflexivité de ce dernier.e.s (Causa, 2021) travaillant avec ces publics et plus largement sur les politiques linguistiques et éducatives.

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Enfin, le caractère complexe et multisitué de cet objet de recherche entraine inévitablement une perspective inter/pluri/disciplinaire (Blanchet, 2018). Ainsi seront également bienvenues des contributions qui croisent les apports des sciences du langage avec d'autres points de vue développés en géographie, en sociologie, en sciences politiques, etc. sur la question des migrations multiples.

Bibliographie

ADAMI Hervé, 2009, La formation linguistique des migrants, Paris, Clé International.
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BEACCO Jean-Claude, KRUMM Hans-Jürgen, LITTLE David, THALGOTT Philia(dirs.), 2017, The Linguistic Integration of Adult Migrants: Some Lessons from Research / L’intégration linguistique des migrants adultes : les enseignements de la recherche, Berlin, DeGruyter Mouton.
BEAUCHEMIN Cris, 2015, « Migrations entre l’Afrique et l’Europe (MAFE) : Comprendre les migrations au-delà de l’immigration », Population, vol. 70, pp. 7-12.
BILLIEZ Jacqueline, 1979, Analyse des besoins du public francophone en langues et cultures d’origine des populations migrantes : application au contexte médico-hospitalier, Thèse de troisième cycle, université Grenoble-III.
BLANCHET Philippe (dir.), [2013] 2018, « Interdisciplinarité, intercompréhension, interculturation : retour réflexif sur un programme de recherche », dans Blanchet Philippe, Éléments de sociolinguistique générale, Limoges, Lambert Lucas, pp. 237-241.
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CANUT Cécile, GUELLOUZ Mariem, 2018, « Pratiques langagières, expériences migratoires », Langage et Société, n°165, 222 p.
CAUSA Mariella, 2021, « Complexification des besoins en recherche et en formation : retour sur la notion d’adaptabilité professionnelle » dans Tomc Sandra, Totozani Marine, Villa-Perez Valeria (dirs.), Sociolinguistique et didactique en dialogue. Cheminements avec Marielle Rispail, Paris, L’Harmattan, pp. 185-201.
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TARRIUS Alain, 1992, « Territoires circulatoires et étapes urbaines des transmigrant(e)s », Regards croisés sur l’économie, n° 8, pp. 63-70.
THAMIN Nathalie, ALI-BENCHERIF Mohammed Zakaria, CALINON Anne-Sophie, MAHIEDDINE Azzeddine, PLOOG Katja, 2019, Mobilités dans l’espace migratoire Algérie, France, Canada, Aix-Marseille, Presses Universitaires de Provence.
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VERMES Geneviève, 1988, « Vingt-cinq communautés linguistiques de la France », Les langues immigrées, Tome 2, Paris, L’Harmattan.
VILLA-PEREZ Valeria, (à paraitre juin 2021), « Immigrants as new speakers of Italo-romance dialects. A study of sociolinguistic representations in the Emilia-Romagna region » dans Goglia Francesco, Wolny Matthias (dirs.), Italo-Romance dialects in the linguistic repertoires of immigrants in Italy, London,Palgrave MacMillan.
VILLA-PEREZ Valeria, 2017, « Médiation et contact des langues à l’université. Les cas d’étudiant.e.s italien.ne.s issue.s de l’immigration et nouvellement arrivé.e.s en France », communication donnée lors du Colloque International ACEDLE, La médiation en didactique des langues, formes, fonctions, représentations. Recherches en didactique des langues, Université Bordeaux Montaigne, 19, 20 et 21 Janvier 2017.

 

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1 Cf. projet de recherche Tavares B., Duchêne A., 2019-2020, Rencontres postcoloniales dans le contexte de la mondialisation. (Dés)enchevêtrement des positions sociales des migrant-e-s lusophones en Suisse.

Calendrier de publication

Date limite de réception des contributions : 31 décembre 2021
Envoi des contributions à : valeria.villa@univ-st-etienne.fr, marine.totozani@univ-st-etienne.fr et glottopol@gmail.com
Consignes pour la remise des textes : voir ci-dessous
Parution : octobre 2022

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  - Résumé de l'article (150 mots) ;
  - Mots clés.

Les articles peuvent être aux formats suivants :
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Respectez les normes typographiques françaises.
Les références bibliographiques complètes seront placées à la fin de l'article (pas de référence en note de bas de page), en développant les prénoms des auteurs. Dans le texte, les références figureront entre parenthèses. La norme est la suivante : Nom (en minuscules), année : page(s). Exemples : (Caitucoli, 1912 : 126) ; (Caitucoli, 1931b : 56-57).
Les notes en bas de page sont autorisées.
Laissez les en-têtes et les pieds de page vides, ne numérotez pas les pages.

Utilisation de la feuille de style

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Caractéristiques de la feuille de style Glottopol

Mise en page: Format A4 ; Marges = 2,5 cm (haut, bas, droite, gauche) ; Reliure = 0 cm ; En tête et pied de page 1,25 cm.

Style normal (pour le corps de texte) : Police Times 12 points, sans couleurs, sans attributs (gras et italiques sont acceptés pour des mises en relief) ; paragraphe justifié, pas de retrait, pas d'espacement, retrait de première ligne positif= 0,5 cm, interligne simple.

Titre de l'article : Police Times 14 points, sans couleurs, majuscules, gras ; paragraphe centré, pas de retrait, espacement après = 18 points, pas de retrait de première ligne, interligne simple.

Titre 1 : Police Times 14 points, sans couleurs, gras ; paragraphe gauche, espacement avant = 18 points, espacement après = 12 points, pas de retrait, pas de retrait de première ligne, interligne simple.

Titre 2 : Police Times 12 points, sans couleurs, gras ; paragraphe gauche, espacement avant = 12 points, espacement après = 6 points, pas de retrait, pas de retrait de première ligne, interligne simple.

Titre 3 : Police Times 12 points, sans couleurs, italiques ; paragraphe gauche, espacement avant = 12 points, espacement après = 3 points, pas de retrait, retrait de première ligne = 0,5 cm, interligne simple.

Notes : notes de bas de page, numérotation continue, 1…2…3… ; Police Times 10 points, sans couleurs, sans attributs (gras et italiques sont acceptés pour des mises en relief) ; paragraphe justifié, pas de retrait, pas d'espacement, pas de retrait de première ligne, interligne simple.

Bibliographie : Police Times 12 points, sans couleurs, sans attributs (gras et italiques sont acceptés pour des mises en relief) ; paragraphe justifié, pas de retrait, pas d'espacement, retrait de première ligne négatif = 0,5 cm, interligne simple.

Sélection des contributions

Les contributions reçues font d'abord l'objet d'une validation par le responsable du numéro, qui vérifie l'inscription dans la thématique annoncée et le respect minimal des règles déontologiques, des attendus d'un article scientifique (données, sources, etc.) et des normes formelles d'écriture.
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Dernière mise à jour :

19/02/2022

 

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