Revue de sociolinguistique en ligne | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
N°18 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Sommaire
ISSN : 1769-7425 |
Présentation par Fabienne LeconteIl me revient le plaisir de présenter ce numéro spécial de Glottopol en hommage au fondateur de la revue. Revue en ligne, donc jeune encore, puisque le premier numéro date de 2003. Mais les exigences et la rigueur de son fondateur tant sur la qualité rédactionnelle ou éditoriale que sur le respect des rythmes de publication ont permis à Glottopol de se faire une place dans l’édition en sciences du langage. Claude Caitucoli a très tôt vu l’importance qu’allait prendre l’édition en ligne dans les années qui allaient suivre alors que celle-ci était encore considérée, en France par quelques esprits d’arrière-garde, comme « moins prestigieuse » que les revues papiers, ce qui pouvait signifier une condamnation sans appel à l’heure de la course à l’évaluation et du retour en force d’un certain conformisme. Aujourd’hui l’accessibilité et la gratuité demeurent des atouts importants pour qui souhaite développer un débat scientifique le plus large possible, incluant aussi les chercheurs des pays du Sud. On peut raisonnablement penser que les années africaines de Claude Caitucoli ne furent pas étrangères à cette entreprise. L’importance, depuis la création de la revue, des contributions et des directions de numéros émanant de chercheurs dont les travaux se situent en dehors de la francophonie hexagonale, au Nord comme au Sud, montre l’intérêt d’un espace de publication sociolinguistique en français ne se limitant pas aux frontières de l’hexagone. Ce numéro n’y fait pas exception. Un autre aspect qui me semble important à souligner de la carrière de Claude Caitucoli est bien sûr l’Afrique, l’Afrique de l’Ouest surtout et l’investigation de terrains « exotiques » ou pour employer un vocabulaire politiquement correct « non hexagonaux », pour y avoir débuté sa carrière comme maitre-assistant au Tchad de 1976 à 1978 puis à Dakar de 1978 à 1985. Il fut ensuite maitre de conférences à l’université de Ouagadougou avant de rejoindre l’Université de Rouen. La curiosité pour les phénomènes de plurilinguisme et la volonté de comprendre et de théoriser les situations sociolinguistiques complexes trouvent leur origine dans cette confrontation au plurilinguisme après avoir été confronté au plurilectalisme en Corse. Cette réflexion, menée alors en contexte francophone par une poignée d’africanistes, fut bien antérieure aux travaux initiés par le Conseil de l’Europe, où le plurilinguisme fut revendiqué comme un but à atteindre chez les élèves de l’Union européenne au début des années deux mille. Ces années africaines et son intérêt pour l’Afrique qui n’a jamais cessé avec son retour en France, y compris lorsqu’il s’installa dans un village brayon, sont largement présentes dans ce numéro par les contributions des collègues africains (M. Daff, AB Kébé, F. Mbow, P. A. Ndao, M.L. Sanogo, B. Thioune) ou de collègues menant une partie de leurs investigations sur certains terrains africains fussent-ils insulaires (S. Babault, F. Laroussi, F. Leconte, V. Miguel-Addisu). Parmi les centres d’intérêt qui ont alimenté la réflexion de Claude Caitucoli, je retiendrai d’abord l’intérêt pour les pratiques langagières, dans une approche incluant une dimension forte d’anthropologie linguistique. Cet intérêt traverse l’ensemble de ce numéro dans des réflexions dont les origines se situent en Afrique noire (Cf. supra), mais aussi sur des terrains américains dans les contributions de D. Moore et M. Mac Donald, et dans celle de F. Leconte. Dans cette réflexion sur les pratiques langagières, les questions de normes, normalité, normativité ont été interrogées (Caitucoli 1999, 2003), y compris en France sur le terrain scolaire dans une approche non pas didactique mais sociolinguistique. Cet intérêt pour les questions de normes se retrouve également dans ce numéro, appliqué à des terrains aussi divers que les médias sénégalais, la Guyane française, l’école à Mayotte ou dans une réflexion plus théorique sur le politiquement correct (R. Nicolaï) ou les postures face aux normes (C. Mortamet). L’approche sociolinguistique est aussi structurante dans les travaux que Claude Caitucoli a consacré à la littérature francophone (Caitucoli, 2004), représentés ici par les contributions de B. Thioune et F. Mbow. Traverser une carrière universitaire c’est aussi adopter une certaine posture par rapport à la communauté, à la formation, à la recherche et aux questions déontologiques qui se posent inévitablement dès lors que le linguiste ne travaille pas en chambre. L’investissement fort de Claude Caitucoli dans la formation d’étudiants qui deviendront plus tard docteurs puis collègues se retrouve dans le nombre important de contributions émanant de collègues qu’il a formés, que celles-ci portent ou non sur le rôle de formateur. L’hommage est aussi donné par des collègues, que ce soit au travers de réflexions invitant à se méfier du conformisme ou s’interrogeant sur la posture par rapport aux enquêtés ou l’évaluation de la recherche. La réflexion éthique, même si elle n’est pas affichée comme telle, traverse aussi ce numéro. C’est à un cheminement, qui prend son départ parmi les terrains que Claude Caitucoli a investigué que je convie le lecteur à travers ce numéro. Les questions de politiques linguistiques sont toujours liées en Afrique aux questions de politiques éducatives, tant le défi de scolariser et d’alphabétiser l’ensemble de la population reste immense pour le continent. Dans ce cadre, le choix des langues d’enseignement et les conditions de réussite d’un enseignement partiellement en langue(s) africaine(s) restent cruciaux même si le plurilinguisme naturel africain est condamné à composer avec la présence du français, langue de scolarisation depuis la présence coloniale jusqu’à nos jours. C’est le sens de la contribution de Moussa Daff qui interroge les conditions de réussite d’un enseignement en langues partenaires. A travers l’exemple du wolof, il soutient qu’une démarche comparative à visée sociodiactique est une piste d’avenir pour la recherche en didactique convergente entre le français et les langues africaines. La démarche peut faciliter une meilleure appropriation des bigrammaires par les enseignants bilingues en exercice. La réflexion porte toujours sur l’école et au Sénégal avec l’article de Birahim Thioune qui rejoint une des thématiques de recherche de Claude Caitucoli : la littérature francophone. Ici l’auteur s’interroge sur la prise en compte de l’arrière-fond culturel des élèves sénégalais au travers de l’utilisation du conte en classe à des fins de formation esthétique et d’appropriation du patrimoine culturel traditionnel, et ce dans l’optique de la conception et de la mise en œuvre d’une pédagogie renouvelant la relation apprenant /enseignant.Nous restons en Afrique mais quittons le débat didactique pour nous pencher sur une autre dimension de la littérature francophone. C’est par le biais des fonctions du paratexte dans trois œuvres littéraires désormais classiques : Le Cercle des tropiques (Alioum Fantouré), Perpétue (Mongo Béti) et Entre les eaux (Yves-Valentin Mudimbé) que Fallou Mbow, interroge la visée de dénonciation du pouvoir politique et/ou religieux dans ces trois romans écrits en français dans la période qui a suivi les indépendances. Le paratexte constitue alors une modalité littéraire de légitimation de l’énonciation, mais c’est également un moyen d’action sur le lecteur. Cap sur la grande île avec la contribution de Sophie Babault qui interroge les actes de nomination des écoles privées à Madagascar par les directeurs des établissements en choisissant soit le français soit le malgache et, plus récemment, l’anglais. Les réactions des parents d’élèves face aux différentes langues utilisées pour dénommer les écoles montrent que la question des langues et de l’école ne peut plus se poser dans des termes binaires opposant la langue nationale au français, mais qu’émerge une demande d’approche trilingue qui est en train de modifier le paysage scolaire. De Madagascar, embarquons maintenant sur une kwassa-kwassa pour rejoindre l’île de Mayotte où il est aussi question des langues de l’école dans la contribution de Foued Laroussi qui interroge les représentations d’adultes mahorais quant aux langues co-présentes sur l’île, le français et les langues mahoraises, notamment leur place dans l’enseignement comme medium. Au travers de l’analyse de discours d’enquêtés adultes, souvent instituteurs, il ressort une ambivalence de la population vis-à-vis de la situation sociolinguistique de l’île : le français est vu comme la langue incontournable de l’accès à la modernité, tout en étant perçu comme une menace pour l’identité mahoraise. Le propos de Régine Delamotte-Legrand s’ancre d’abord lui aussi dans cette réalité mahoraise mais à partir d’une réflexion sur les répertoires langagiers des élèves et sur leur hétérogénéité. Elle élargit le propos à la prise en compte du répertoire verbal des élèves, à l’introduction des différentes langues et cultures à l’école dans une perspective à la fois sociolinguistique et didactique.Il nous faut un avion pour rejoindre le continent américain, tout en restant en francophonie dans un premier temps avec la contribution de Fabienne Leconte qui, à partir de l’exemple d’une communauté amérindienne de Guyane, mais sans s’interdire quelques incursions du côté de l’Afrique noire, s’interroge sur la mise à l’écrit des langues minorées et leur introduction à l’école quand celles-ci ne semblent pas faire consensus de la part des populations concernées. Le maintien du primat de l’oralité dans les représentations peut aussi être perçu comme une forme de résistance culturelle, contradictoire avec l’idée couramment admise que, dans une situation pluriglossique, les langues minorées doivent être écrites pour égaler en dignité les langues dominantes. La résistance et la réappropriation culturelles sont aussi présentes dans les processus de nomination Stó :lō, communauté amérindienne de Colombie britannique, analysés par Danièle Moore et Margaret Mac Donald. Elles montrent en outre comment, dans leurs récits, les jeunes mères Stó:lō ayant grandi sans parler la langue halq’eméylem, aujourd’hui en phase d’active revitalisation, résistent à l’analyse des dynamiques identitaires proposées par les chercheures. Le voyage sur terre se termine avec les dernières contributions étudiant non plus des problématiques ancrées sur des terrains mais s’interrogeant sur des dimensions qui ont traversé la réflexion de Claude Caitucoli. Les normes d’abord, avec le texte de Clara Mortamet qui, à partir d’un modèle sémiotique décrivant les figures de l’Autre, interroge les postures par rapport à la norme et à la normalité au travers de l’orthographe tout d’abord puis en élargissant à d’autres secteurs de la vie sociale. Elle rend ainsi hommage au goût de la métaphore et à la fantaisie de Claude Caitucoli. La contribution de Robert Nicolaï porte elle aussi sur des questions de normalité et de conformisme et interroge la construction d’un objet scientifique « politiquement correct » dans le domaine des sciences du langage : « l’origine des langues ». Enfin pour boucler la boucle nous terminerons ce voyage avec la contribution de Didier de Robillard qui propose de débattre des processus d’évaluation des textes en amont d’une publication. C’est au fondateur de la revue qu’il s’adresse en premier lieu mais son propos se veut contribution plus large au débat sur l’évaluation de la recherche et de ses produits dans une démarche qualitative. Bibliographie Sommaire
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Résumés
Le Sénégal est un pays plurilingue avec plus d’une vingtaine de langues parlées dans son territoire. Certaines de ces langues ne sont parlées que dans quelques régions, alors que d’autres dépassent largement les frontières nationales. C’est le cas par exemple du pulaar, du bambara et du wolof utilisés dans les pays voisins. Cet article s’intéresse à la gestion de la diversité linguistique dans ce pays. En nous situant dans une perspective sociohistorique, nous revisitons et questionnons les postures de l’Etat et de la société civile (deux forces glottopolitiques) face à l’enjeu de la diversité linguistique. Nous chercherons à comprendre dans quelle mesure les pratiques institutionnelles peuvent influencer sur le statut et le corpus des langues dans le processus sociolinguistique local.
Cet article se propose d’étudier le wolof tel qu’il est parlé dans les médias (radios privées en particulier) au Sénégal. En nous appuyant sur un corpus radiophonique tiré de trois radios privées (Sud FM et RFM), nous analysons le comportement langagier des journalistes face à la variété du wolof la plus parlée dans l’espace sénégalais : le code mixte français-wolof nommé ici « parlé ordinaire sénégalais » ou POS.
Notre projet dans cet article est de tenter d’habiller didactiquement le concept de partenariat linguistique en francophonie africaine. En effet, le plurilinguisme naturel africain est, aujourd’hui, condamné à composer avec la présence du français, langue de scolarisation depuis la présence coloniale à nos jours. Cet aménagement didactique passe par un questionnement des motivations de la codification, des principes d’une grammaire à visée scolarisante. C’est pourquoi, nous soutenons qu’une démarche comparative à visée sociodiactique est une piste d’avenir pour la recherche en didactique convergente entre le français et les langues africaines. Nous prenons ici l’exemple du wolof dans sa grammaire primaire en nous appuyant fortement sur les grammaires descriptives et académiques réalisées dans des thèses et autres articles scientifiques. Notre démarche reste pragmatique et en adéquation avec la recherche-action qui facilite une meilleure appropriation des bigrammaires par les enseignants bilingues en exercice dans les écoles bilingues.
La formation esthétique de l’écolier sénégalais, sous l’angle de la culture littéraire, prendra utilement en compte les textes d’auteurs de manuels de lecture et les écrits paralittéraires, avant l’étude des productions de grands écrivains. Ainsi, les contenus graphiques des manuels scolaires s’accompagneront de corpus simples ou simplifiés comme « passerelles » ou préalables à l’étude de textes d’auteurs confirmés. Mais dans ce travail d’initiation, on ne négligera pas le rôle de l’iconographie qui est constitutive de la démarche d’accès au sens. Les exemples de La Belle Histoire de Leuk-le-Lièvre (L.S.Senghor et A. Sadji) et du Fabuleux tour du monde de Raby (N. D. Diouf) peuvent constituer un bon prétexte, pour la conception et la mise en œuvre d’une activité pédagogique susceptible d’être envisagée, dans une perspective renouvelée de la relation apprenant/enseignant.
L’article montre que le paratexte, c’est-à-dire les éléments périphériques de l’œuvre littéraire, qui se trouvent hors de la fiction ont une fonction, mieux ils ont une valeur pragmatique, plaçant auteur et lecteur dans une « scène d’énonciation » où ils interagissent. Evénement unique, cette scène est un dispositif d’énonciation à laquelle l’institution littéraire, suivant une perspective d’analyse du discours, assigne un rôle précis, celui d’exprimer le projet littéraire. Dans les romans de la littérature africaine comme Le Cercle des tropiques (Alioum Fantouré), Perpétue (Mongo Béti) et Entre les eaux (Yves-Valentin Mudimbé), ce projet a pour visée la dénonciation du pouvoir politique et/ou religieux. Le paratexte constitue ainsi une modalité littéraire de légitimation de l’énonciation, mais c’est également un moyen d’action sur le lecteur. Il sert ainsi à orienter la lecture dans un sens ou un autre, en fonctionnant comme des espèces particulières d’« instructions » adressées au lecteur. Mots clés : Paratexte, énonciation, visée illocutoire, discours littéraire, coopération, performatif.
L’option des langues transfrontalières et des langues de grande diffusion africaine occulte la dimension des langues minoritaires qui sont, par la même occasion, exclues du débat politique. Cependant, ces langues qui sont les références identitaires de planificateurs et autres acteurs politiques de premier plan s’imposent comme une nécessité car leur exclusion du système ne fait que compromettre tous les efforts déployés jusqu’à présent dans les politiques linguistiques africaines. Le présent article montre qu’il faudrait régler la question des langues minoritaires dans une vision globale de la politique linguistique en situant chaque langue sur le plan écologique dans sa niche afin d’éviter les frustrations consécutives à la marginalisation des minorités linguistiques et à l’irrédentisme des communautés de langues minoritaires. Mots clés : minorités linguistiques, Union Africaine, politique linguistique panafricaine, politiques linguistiques, langues transfrontalières.
A travers la relecture d’un parcours doctoral impliqué en sociolinguistique sur un terrain scolaire plurilingue, on montrera comment ici l’implication permet de révéler des dynamiques sociolangagières qui aident à comprendre les pratiques et représentations langagières des acteurs. Une démarche de recherche impliquée permet donc aussi de proposer des processus de catégorisation pertinents pour interroger le contact des normes entre le champ scientifique et le champ social, entre les représentations monolingues et plurilingues d’un même objet de recherche. De cette problématisation d’une recherche sociolinguistique envisagée comme un processus dynamique émerge la notion de « posture plurilingue » qui, associée aux pratiques et représentations des acteurs, renvoie le chercheur à la question plus générale de la nécessaire réflexivité portant sur les tensions inhérentes aux liens forgés entre théorie et terrain. Mots clés : réflexivité, ethno-sociolinguistique, implication, plurilinguisme, didactique du français.
En contexte plurilingue, tout acte de dénomination revêt une signification sociolinguistique en positionnant l’objet dénommé par rapport à l’ensemble des langues coexistant dans une communauté donnée. Dans le domaine éducatif, le choix du nom donné à un établissement scolaire est particulièrement révélateur dans la mesure où ce positionnement implique généralement de la part des responsables d’établissements une prise en compte des valeurs véhiculées par les différentes langues chez les parents d’élèves. C’est dans ce cadre que le présent article analyse les noms des écoles privées d’Antananarivo, la capitale de Madagascar, qui indiquent des tendances très marquées entre trois pôles linguistiques : le malgache, le français et l’anglais. Le corpus est constitué d’interviews avec des chefs d’établissements et de questionnaires remplis par des parents d’élèves. L’analyse du corpus vise à vérifier le poids des langues utilisées dans les choix identitaires des dénominations d’établissements, que ce soit du côté des éducateurs ou de celui des parents, tout en cherchant à mettre en évidence des évolutions dans les tendances repérées. Mots-clés : Madagascar, dénomination, établissements scolaires, noms d’écoles, politique linguistique éducative, plurilinguisme
Les questions de l’hétérogénéité des élèves, de leur scolarisation en lien avec leur répertoire langagier a été un des grands intérêts de recherche de Claude Caitucoli. Cette contribution développe à son intention et en quelques mouvements de pensée des réflexions à la croisée de travaux sur l’éducation plurilingue et sur la didactique du français dans des situations de contacts de langues. Il sera en particulier question de la scolarisation des enfants de l’île de Mayotte - où s’est rendu en éclaireur pour notre laboratoire Claude Caitucoli - dans une articulation entre sociolinguistique et didactique. Cette articulation constitue l’objectif d’une sociodidactique, héritière de la sociolinguistique scolaire, de la sociolinguistique du plurilinguisme et de la didactique des langues. L’introduction des diverses langues et cultures des enfants dans l’institution scolaire est un projet (un défi) passionnant pour l’école. C’est déjà, sous diverses formes, une réalité pour une partie importante de la population scolarisée dans le monde, mais reste un grand sujet de débat dans nos disciplines.
Depuis les travaux fondateurs de J. Goody sur la littératie, le passage à l’écrit d’une langue jusqu’alors uniquement orale est souvent considéré comme une nécessité, notamment pour sa conservation. A partir de l’exemple guyanais, cet article analyse les conflits de légitimité potentiels portés par la mise à l’écrit de langues minoritaires et minorées. Les propos d’adolescents réunis pour une discussion de recherche autour des langues d’un bourg frontalier avec le Brésil ont montré une grande ambivalence de la communauté amérindienne palikur autour du passage à l’écrit de sa langue : à la fois considéré comme un progrès mais lourd de danger de dépossession du pouvoir des anciens au bénéfice des linguistes, non légitimes car extérieurs à la communauté. Cette ambivalence fait écho à des remarques glanées auprès de locuteurs d’autres langues minorées et de tradition orale, en Afrique occidentale notamment. Mots clés : littératie, minoration, plurilinguisme
La Colombie-Britannique, province de l’ouest du Canada, regroupe 60 % des langues autochtones du Canada, avec 32 langues, toutes en grand danger d’extinction. Au moment du contact avec les Européens, 100 % des groupes autochtones parlaient leur langue, bien que le plurilinguisme ait été la norme. Aujourd’hui, on ne compte guère plus que 5,1 % de la population autochtone qui connaît encore sa langue (First Peoples’ Heritage, Language and Culture Council, 2010). Dans ce contexte de grande fragilité linguistique et culturelle, notre étude se construit en plusieurs temps. Nous aborderons d’abord trois aspects de la nomination : dans une première partie, i) celle qui concerne les lieux et ii) celle qui concerne les peuples comme formant un arrière-plan idéologique, un contexte pour comprendre et aborder, dans une seconde partie, iii) celle qui se rapporte aux personnes, sous l’angle particulier de la prénomination des enfants nouveaux nés. Nous verrons enfin comment, dans leurs récits, les jeunes mères Stó:lō ayant grandi sans parler la langue halq’eméylem, aujourd’hui en phase d’active revitalisation, résistent à l’analyse des dynamiques identitaires que nous souhaitions étudier. Ce faisant, elles ouvrent de nouveaux espaces de sens et encouragent l’adoption d’une nouvelle posture pour le chercheur. Mots clés : sociolinguistique, affirmation identitaire, dénomination anthroponymique, normalisation sociolinguistique, onomastique identitaire, redénomination, identités plurilingues et pluriculturelles.
Ce texte profite de l’hommage rendu à Claude Caitucoli pour présenter puis prolonger une réflexion menée à partir de l’ouvrage de Landowski, 1997, Présence de l’autre, PUF. Le modèle présenté par l’auteur permet d’organiser entre elles les différentes façons que l’on a de se positionner face à une norme, ou à une normalité. Il a été exploité dans la thèse, discuté jusqu’à la soutenance de ce doctorat, et fait l’objet dans ce texte de prolongements divers, à partir de lectures, de réflexions récentes, sans toutefois prétendre ni épuiser les terrains d’application du modèle ni épuiser les discussions autour des terrains choisis ici pour illustration. Mots clés : norme, normalité, postures, altérité, variation, Landowski.
La présence du « politiquement correct » dans la vie sociale ordinaire est une question qui prend plus ou moins d’acuité selon ce sur quoi il s’applique et selon les époques. Valorisé par certain, stigmatisé par d’autres, de par sa récurrence dans nos rapports sociaux, on subodore son importance. Mais ce n’est pas qu’au plan des rapports sociaux de la vie ordinaire que le politiquement correct se manifeste, il est tout aussi présent dans le cadre des activités professionnelles et dans tous les rapports de pouvoir. Dès lors, son imposition, sa maîtrise, et le cas échéant, sa manipulation et sa réorientation sont susceptibles de modifier notre capacité d’analyse et de réflexion. En ré-analysant certains aspects de l'histoire linguistique des XIXe et XXe siècles et en les accolant à des thèmes mythologiques avec le support d'une forte médiatisation, d’importants moyens institutionnels de l’appareil scientifique, le questionnement initialement taboué sur l’origine des langues a pu être, ces dernières années, transformé en nec plus ultra de la recherche linguistique du moment. En m'appuyant en partie sur une réflexion introduite par Barthes à l'époque des Mythologies (1957), j'analyse cette dynamique comme un exemple de basculement dans les représentations et comme une manipulation volontariste adossée à l’ordre du « politiquement correct ». Il s'agit donc de reconnaitre à la fois l'inéluctabilité et l'importance de sa présence.
Dans cet article, l'auteur conçoit une revue qualitative non seulement comme un lieu de publication de travaux qualitatifs, mais comme un lieu d'évaluation de la recherche fonctionnant de manière intégralement qualitative (donc, d'un point de vue sociolinguistique, avec un traitement qualitatif des discours soumis à évaluation), et en imagine quelques conséquences. Mots-clés : Evaluation de la recherche – Publication – Discours – Démarche qualitative – Herméneutique – Sociolinguistique [est-ce utile pour un article dans Glottopol ?]
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