Revue de sociolinguistique en ligne | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
N°9 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Sommaire
ISSN : 1769-7425 |
Présentation par Robert FournierLes français
d'Amérique ou le français des Amériques ? questionnait
fort pertinemment en titre Chaudenson (1995), où il notait par ailleurs
que " depuis le début des années 70, les études sur
les français des Amériques ont considérablement progressé,
surtout pour les variétés extra-québécoises... "
(p. 3). Au cours des dix dernières années, on a pris l'habitude
croissante de recourir au vocable francophonie pour désigner les différentes
variétés de français en Amérique et leur écologie
particulière ; en témoigne la Biennale Amérique de la langue
française tenue à Moncton récemment (17-19 août 2006),
qui utilise ce vocable près de vingt fois dans les deux pages de présentation
de son programme (http://www.umoncton.ca/icrml/bienvenue.html),
dont le thème était La langue française en Amérique
: dynamiques spatiales et identitaires. L'intérêt pour les francophonies
américaines ne s'est effectivement pas refroidi depuis le début
des années 70, comme en témoigne encore le recueil de Valdman et
al. (2005), qui présente une collection de 25 textes visant à
dresser l'état présent du français en Amérique du
Nord. Marc Picard étudie le fonds patronymique francophone et décrit la façon dont les noms de famille que portaient les premiers immigrants français en Nouvelle-France aux XVIIe-XVIIIe siècles se sont développés et répandus, d'abord au Québec et en Acadie, puis à travers l'Amérique du Nord. A partir de fragments de discours exprimant
des représentations épilinguistiques tirés de deux corpus
importants de la langue orale québécoise, Paul Laurendeau
cherche à démontrer que dans le cadre social des masses non-élitaires
québécoises avoir un méchant langage est autant un
comportement interactif de nature sociale, que la manifestation du statut de dépositaire
d'un corpus de formes linguistiques fustigées. Le texte de Julie Auger et de Anne-José Villeneuve présente une étude phonologique distributionnelle de la réalisation du schwa dans les groupes clitiques à partir de deux corpus du français québécois, Saguenay et Montréal, et compare son comportement à celui de la voyelle correspondante en picard du Vimeu. Patrice Brasseur
étudie les représentations linguistiques et les jugements de
valeur de la communauté francophone de la péninsule de Port-au-Port
sur la côte ouest de Terre-Neuve, laquelle conserve le souvenir et la fierté
de ses origines bretonnes et acadiennes, françaises en somme, mais pour
qui le bilinguisme est devenu une réalité vitale, après avoir
évité l'assimilation complète. En matière linguistique,
les références originelles des Franco-Terre-Neuviens n'ont plus
guère d'ancrage que dans un passé qui s'éloigne avec le souvenir
de leurs ancêtres, instruits dans leur langue, les derniers authentiques
Français, qui restent, aujourd'hui encore, célébrés,
valorisés. Marie-Odile Magnan et Annie Pilote proposent une réflexion sur l'évolution de la francophonie minoritaire dans le contexte du multiculturalisme canadien. Cet essai porte plus spécifiquement sur l'éducation vue comme une institution centrale au projet collectif de reproduction de la langue et de la culture françaises en milieu minoritaire au Canada. Prenant appui sur l'expérience franco-ontarienne, qui est marquée plus que toute autre communauté par le pluralisme culturel, cet essai tente de montrer en quoi les enjeux auxquels font face les écoles de la minorité soulèvent des questions d'ultime importance en regard de l'avenir collectif. Pour sa part, Michel Chevrier voit dans le théâtre franco-ontarien des années 1980-1990 un moment de transition qui reflète le passage de la disparition de la culture traditionnelle franco-ontarienne à son intégration dans un Ontario nouvellement pluraliste et hétérogène. Voilà qui complète la tournée des contributions au domaine franco-canadien. Un Franco-Américain, selon Edith Szlezák, se définit avant tout comme un résident permanent de la Nouvelle-Angleterre de souche canadienne-française (Québécois et Acadiens), par opposition aux Canadiens-Français qui sont venus y vivre et y travailler pour un temps limité, ou aux descendants directs de France, et dont les attitudes concernant le maintien de la langue sont une toute autre affaire. Parmi les facteurs qui ont contribué à une attitude négative envers le maintien de la pratique du français et de sa transmission, on note la dispersion de la communauté franco-américaine, la pression d'une langue unique anglaise dans la société américaine, et le manque de programmes bilingues dans les écoles des secteurs publics et privés. Ces facteurs ont entraîné des conséquences intra-linguistiques considérables, typiques des phénomènes d'interférences dans des situations de langues en contact. Szlezák s'intéresse particulièrement aux phénomènes de changement de code (code-switching) et de mélanges de codes (code-mixing), qui pourraient bien être pour les descendants québécois et acadiens du Massachusetts un indicateur de dépérissement de la langue, voire de sa disparition. Jane
Smith et Cynthia Fox font le point sur les analyses qu'elles ont déjà
produites jusqu'ici, notamment la situation du franco-américain à
l'heure actuelle, l'implantation des dialectes franco-canadiens et acadiens et
le maintien ou la perte de leurs traits d'origine ; les conséquences linguistiques
du contact avec l'anglais et de l'emploi réduit du français ; et
enfin le franco-américain à l'intérieur du dynamisme du français
nord-américain. Présence invisible dans le champ des littératures francophone et ethnique américaines, la littérature franco-américaine de la Nouvelle-Angleterre, qu'elle s'exprime en français ou en anglais, est la gardienne d'une mémoire francophone, d'un patrimoine culturel et linguistique qui réfute l'oubli. Peggy Pacini analyse la place de la langue française dans quelques romans franco-américains, qui y apparaît sous différentes formes (discours métissé, forme dialectale, français littéraire) et y occupe diverses fonctions (incise, dialogue, narration, monologue). L'image de la langue française dans ces romans permet de mieux comprendre, selon l'auteure, cette dialectique du bon et du mauvais français qui est sûrement à l'origine de la disparition de cette langue au sein de cette communauté. Tout
à l'opposé sud de la Nouvelle-Angleterre se trouve la Louisiane,
et sa très renommée capitale historique la Nouvelle-Orléans.
Pourquoi cette ville a-t-elle conservé jusqu'à nos jours un paysage
aussi francophone sans commune mesure avec une quelconque pratique réelle
du français ? C'est ce paradoxe que Pascal Lepesqueux cherche à
comprendre par une analyse de la situation sociolinguistique de la ville, qui
lui permettra de distinguer les différentes fonctions attribuées
à ce français 'hérité', et de faire la part de ce
qui relève d'une simple exploitation commerciale et de l'expression d'un
attachement plus profond. En finale, je propose mon interprétation mi-sarcastique mais très sérieuse d'une petite histoire des Français d'icitte, de Jacques Cartier jusqu'à Vaudreuil, père et fils, en passant par Donnacona et les frères Kirke ! Nous sommes heureux d'accueillir dans ce numéro autant de chercheurs de disciplines et d'horizons divers, et nous souhaitons qu'il contribuera à passionner d'autres chercheurs, jeunes et établis, car nous croyons, tout comme Robert Chaudenson, que malgré une nette progression dans ce domaine de recherches, 10 ans plus tard, tout n'a pas encore été dit et résolu. Bibliographie Sommaire
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Résumés
La présente étude
vise à décrire la façon dont les noms de famille que portaient
les premiers immigrants français en Nouvelle-France aux 17e et 18e siècles
se sont développés et répandus, d'abord au Québec
et en Acadie, puis à travers l'Amérique du nord. Elle cherche aussi
à expliquer comment de nombreux noms étrangers (anglais, allemands,
basques, bretons, etc.) ont été assimilés à ce fonds
patronymique francophone. Avec le temps, plusieurs changements orthographiques
et phonologiques se sont forcément introduits dans ces noms et ont souvent
fait en sorte que leur étymologie devienne obscure. Le but ultime de cette
analyse est donc de démontrer comment on peut arriver à retrouver
l'origine de ces patronymes altérés à l'aide de toutes les
ressources qui sont maintenant à notre disposition. Ceci comprend en particulier
le très grand nombre de sites webs qui sont consacrés à la
généalogie et à travers lesquels on peut dépister
les antécédents de ces noms problématiques. Mots
clés : Canada français, anthroponymie, généalogie
Toujours structuralistes, les linguistes distinguent encore de façon tranchée le social du discursif, et le discursif du linguistique. Or, une telle étanchéité dans le découpage des phénomènes ne se manifeste guère - il s'en faut de beaucoup - dans l'activité identitaire de la culture vernaculaire. Dans le cadre social des masses non-élitaires québécoises, avoir un méchant langage est autant un comportement interactif de nature sociale, que la manifestation du statut de dépositaire d'un corpus de formes linguistiques fustigées. Nous cherchons à démontrer ce fait en analysant des fragments de discours exprimant des représentations épilinguistiques tirés de deux des grands corpus de langue orale québécois (Le Corpus Beauchemin-Martel-Théorêt et le Corpus de la Ville de Québec). Les textes oraux que nous exploitons ont jailli en conditions maximalement interactives, c'est-à-dire à ce moment de l'entretien sociolinguistique où l'enquêteur cherche sciemment à créer des conditions d'insécurité linguistique chez l'informateur en abordant directement des sujets épilinguistiques (posant des questions du type: Connaissez-vous quelqu'un qui parle bien ? ou Trouvez-vous que vous parlez bien français ?). Mots
clés : Québécois, français du Québec, langue
orale, épilinguistique, corpus sociolinguistique
La réalisation
du schwa constitue l'une des questions les plus analysées en phonologie
française. Pourtant, peu d'études examinent en détail le
taux de réalisation et la place du schwa dans un corpus de langue parlée.
Cette étude présente les résultats d'une étude préliminaire
du schwa dans les groupes clitiques en français québécois,
compare le comportement du schwa québécois à celui de la
voyelle correspondante en picard du Vimeu et propose une ébauche d'analyse
des différences observées entre les différents clitiques.
Les origines bretonnes, acadiennes et amérindiennes des Franco-Terre-Neuviens ne subsistent qu'à l'état de souvenirs. C'est le bilinguisme qui caractérise l'usage linguistique local. Après avoir été proches de l'assimilation complète, les locuteurs manifestent une fierté retrouvée, qui s'exprime aujourd'hui le plus souvent sans complexes. Nous examinerons leurs représentations et jugements de valeur concernant les autres variétés de français et les spécificités du vernaculaire.
Cet essai propose une
réflexion sur l'évolution de la Francophonie minoritaire dans le
contexte du multiculturalisme canadien. Il porte plus spécifiquement sur
l'éducation vue comme une institution centrale au projet collectif de reproduction
de la langue et de la culture françaises en milieu minoritaire au Canada.
Prenant appui sur l'expérience franco-ontarienne, qui est marquée
plus que toute autre communauté par le pluralisme culturel, cet essai tentera
de montrer en quoi les enjeux auxquels font face les écoles de la minorité
soulèvent des questions d'ultime importance en regard de l'avenir collectif.
Le théâtre
franco-ontarien des années 1980s et 1990s reflète un temps de transition.
Ce théâtre, qu'on désigne "liminaire" met en scène
des personnages franco-ontariens qui se trouvent à mi-chemin entre la disparition
de leur culture traditionnelle et leur intégration dans l'Ontario nouvellement
pluraliste et hétérogène.
Interference phenomena
are characteristic of language contact situations. Next to a couple of quite interesting
special cases of interference, this article will deal in the first place with
one of the most common ones, code-switching, which Gumperz (1982:59) has defined
as "the juxtaposition within the same speech exchange of passages of speech
belonging to two different grammatical systems or subsystems". Code-switching
in general, but especially intra-sentential code-switching, also referred to as
'code-mixing', is often considered as an indicator of (perfect) bilingualism since
the respective alien passage of speech has to be incorporated into the morphosyntactic
framework of the embedding language, which requires considerable fluency in both
languages. However, examples taken from a corpus of Acadian and Quebecker French
spoken in Massachusetts reveal that code-switching phenomena can also be, quite
on the contrary, an indicator of language decay and, eventually, language loss.
Mots clés : French-Canadians/Franco-Americans;
language-contact phenomena; code-switching
Dans cet article nous
présentons nos recherches en cours portant sur le français des Franco-Américains.
Malgré sa présence de longue date dans le nord-est des Etats-Unis,
il s'agit d'une variété du français nord-américain
dont nos connaissances restent lacunaires. Nous décrivons d'abord le corpus
d'enregistrements que nous avons créé à partir d'une enquête
menée auprès de 275 informateurs Franco-Américians répartis
selon l'âge et le sexe dans huit localités en Nouvelle-Angleterre.
Puis, nous faisons le point sur les analyses que nous avons pu faire jusqu'ici
par rapport à plusieurs questions liées les unes aux autres: 1)
la situation du franco-américain à l'heure actuelle; 2) l'implantation
des dialectes franco-canadiens et acadiens et le maintien ou la perte de leurs
traits d'origine par la suite; 3) les conséquences linguistiques du contact
avec l'anglais et de l'emploi réduit du français; et 4) le franco-américain
à l'intérieur du dynamisme du français nord-américain. Mots clés : français franco-américain,
français nord-américain, Nouvelle-Angleterre, transfert linguistique,
franco-canadien, acadien, dialecte, contact de langues
Très peu répertoriée,
la littérature franco-américaine de la Nouvelle-Angleterre est devenue
une présence invisible dans le champ des littératures francophone
mais aussi ethnique américaine. Néanmoins, qu'elle s'exprime en
français ou en anglais, elle est la gardienne d'une mémoire francophone,
d'un patrimoine culturel et linguistique qui réfute l'oubli. Il sera donc
question d'analyser la place de la langue française dans ces romans, quelle
que soit la forme qu'elle prenne (discours métissé, forme dialectale,
français littéraire) et la fonction qu'elle occupe (incise, dialogue,
narration, monologue). Pour cela, il faudra recontextualiser l'évolution
de cette langue dans ce contexte nord-américain particulier et son rapport
à l'idéologie de la survivance telle qu'elle était véhiculée
par le clergé canadien français. De la même façon,
l'image de la langue française dans ces romans permet de mieux comprendre
cette dialectique du bon et du mauvais français qui est sûrement
à l'origine de la disparition de cette langue au sein de cette communauté.
Mots clés : littérature franco-américaine
de la Nouvelle-Angleterre, littérature francophone, littérature
ethnique, la survivance, oralité, discours métissé, identité.
Cet article cherche
à comprendre le paradoxe suivant : pourquoi la ville de la Nouvelle-Orléans
a-t-elle conservé jusqu'à nos jours un paysage francophone si important
alors que celui-ci est sans commune mesure avec une quelconque pratique réelle
du français ? M'appuyant sur une description de la très complexe
situation sociolinguistique de la ville, une analyse sémantique et syntaxique
des différents marqueurs de cette francophonie (principalement des enseignes
commerciales), en essayant de déterminer les motivations de réception/
émission de tels symboles chez les habitants et les commerçants
locaux. Cela nous permettra de distinguer les différentes fonctions attribuées
à ce français 'hérité'. On pourra ainsi faire la part
de ce qui, dans cette masse francophone, relève d'une simple exploitation
commerciale de ce qui exprime un attachement plus profond. Enfin, entre exploitation
d'un filon touristique, revendications culturelles créoles, et adaptation
de modèles extérieurs par la haute société néo-orléanaise,
on verra que le français hérité de la Nouvelle-Orléans
reste le témoin, voire l'acteur, des enjeux socio-économiques contemporains
de sa ville. Je présente ici quelques unes de mes conclusions. Mots clés : La Nouvelle-Orléans, contact des cultures, image de la France, instrumentalisation identitaire, mythification culturelle, acculturation, regard de l'autre, français écrit, français hérité, enseignes commerciales, Créole, Cajuns, photographie.
Ce court essai, parfois
sous le mode texto-clip, aux intertextes multiples, propose un imaginaire mi-sarcastique
mais très sérieux de l'histoire de la francophonie américaine,
de la découverte officielle du Canada par Jacques Cartier, en passant par
ses figures marquantes françaises, et d'autres aussi, inévitablement,
britanniques, puis canadiennes-françaises, pour aboutir en chute libre
au constat sociolinguistique québécois.
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