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La littérature comme force glottopolitique :
le cas des littératures francophones
Présentation
par Claude Caitucoli Louis Guespin
et Jean-Baptiste Marcellesi (1983 : 5) définissent le terme glottopolitique
comme suit : "Il désigne les diverses approches qu'une société
a de l'action sur le langage, qu'elle en soit ou non consciente : aussi bien la
langue, quand la société légifère sur les statuts
réciproques du français et des langues minoritaires par exemple
; la parole, quand elle réprime tel emploi chez tel ou tel ; le discours,
quand l'école fait de la production de tel type de texte matière
à examen : glottopolitique est nécessaire pour englober tous les
faits de langage où l'action de la société revêt la
forme du politique." Si l'école de Palo Alto pose comme premier
axiome "qu'on ne peut pas ne pas communiquer, qu'on le veuille ou non"
(P. Watzlawick et. al., 1972 : 45), les sociolinguistes rouennais partent
du principe suivant lequel on ne peut pas ne pas agir sur la langue ni sur les
langues : "La glottopolitique est (
) une pratique sociale, à
laquelle nul n'échappe (on "fait de la glottopolitique sans le savoir",
qu'on soit simple citoyen ou ministre de l'économie)." (L. Guespin
et J.-B. Marcellesi, op. cit. : 16). Ce principe, s'il s'applique aux simples
citoyens et aux ministres, s'applique à plus forte raison aux écrivains.
Chacun sait, par exemple, à quel point le patrimoine littéraire
français façonne les imaginaires linguistiques et influence les
productions langagières. La littérature est donc une force glottopolitique.
De plus, ce phénomène universel est particulièrement saillant
dans les littératures dites "francophones" ou "d'expression
française", qui, pour des raisons historiques, culturelles, sociales,
économiques, sont, selon des modalités diverses, confrontées
à des dilemmes glottopolitiques : français vs langue(s) nationale(s)
ou régionale(s), français central vs français périphériques,
etc. On peut alors envisager une approche sociolinguistique des littératures
francophones, qui se donne pour objet d'examiner les rapports entre les uvres
littéraires et les réalités sociolangagières : l'uvre
littéraire envisagée comme produit d'une situation sociolinguistique,
comme révélateur de cette réalité et comme élément
susceptible de la modifier.
L'espace littéraire francophone est un ensemble flou et mouvant dans
lequel les découpages fondés sur l'histoire ou la géographie
sont souvent discutables. Cependant, le sommaire ci-dessous montre bien que certaines
zones sont largement étudiées dans ce numéro tandis que d'autres
sont absentes. La francophonie littéraire du Nord n'est représentée
que par un article sur l'Acadie (aucun article sur les francophonies hexagonale,
suisse, belge, luxembourgeoise, québécoise
). Le Maghreb n'est
également représenté que par un article. En revanche six
articles concernent l'Afrique noire et cinq les zones créolophones (Antilles
et Mascareignes). Cette répartition ne s'explique pas par une ligne
éditoriale préétablie. Elle est le simple reflet des textes
que Glottopol a reçus en réponse à mon appel à
contributions. Néanmoins, j'ai le sentiment que ce déséquilibre
n'est pas entièrement le fait du hasard. Au Burkina Faso, au Sénégal,
en Côte d'Ivoire, au Gabon, à la Martinique, à la Guadeloupe,
à la Réunion, à l'île Maurice, les situations sont
évidemment très diverses. Cependant, sur le plan sociolinguistique,
on peut noter deux propriétés communes à l'ensemble de ces
terrains : ce sont des situations que l'on peut très grossièrement
qualifier de diglossiques, où le français est une langue haute -
en fait la langue haute unique, si on excepte l'île Maurice - en conflit
avec une ou plusieurs langues basses (langues africaines, créoles) ; on
remarque par ailleurs dans ces régions l'émergence de variétés
endogènes du français, de systèmes intermédiaires
et de pratiques interlectales en liaison avec des revendications identitaires.
Ce sont donc des terrains où, en matière d'écriture littéraire,
"l'action de la société revêt la forme du politique"
(L. Guespin et J.-B. Marcellesi, op. cit. : 5) de la façon la plus manifeste,
où les choix langagiers de l'écrivain - choix des langues, des variétés
de langue, des modes d'écriture, des situations linguistiques représentées
- ont des implications glottopolitiques particulièrement fortes et directes.
J'ai choisi d'organiser le numéro en tenant compte de
cette répartition historico-géographique inégale : les six
premiers articles concernent l'Afrique noire francophone, les cinq suivants les
zones créolophones ; les articles sur l'Acadie et sur le Maghreb ferment
le recueil.
La partie consacrée à l'Afrique noire commence par
deux articles à visée générale : le premier (C. Caitucoli)
tente de définir théoriquement la littérature nègre
francophone et l'écrivain en tant qu'agent glottopolitique ; le second
(G. Prignitz) s'intéresse à l'écriture des écrivains
africains contemporains. Suivent l'analyse de deux cas prototypiques, ceux de
Freddy Ndong Mbeng (C. Van den Avenne) et Léopold Sédar Senghor
(P. Dumont). Les deux derniers articles reviennent à des considérations
théoriques, à propos de la notion de négritude (B. Zongo),
à partir des notions de français langue maternelle, langue étrangère
et langue seconde (M. Daff). Si, en matière de glottopolitique, les
littératures sont des forces, les écrivains sont, suivant la terminologie
de Guespin et Marcellesi, des agents. Constatant - après d'autres - qu'il
n'y a aucune unité dans les productions littéraires étiquetées
comme francophones, j'essaie de montrer dans le premier article que ce qui est
décisif, c'est le regard porté sur ces productions : les littératures
francophones sont des littératures minorées, les écrivains
francophones sont confrontés à un processus d'insécurisation.
Ce qui caractérise alors un écrivain en tant qu'agent glottopolitique,
c'est son "style", c'est-à-dire la façon dont il réagit
par l'écriture à la minoration et à l'insécurisation.
Le principe est appliqué à Ahmadou Kourouma dans son dernier roman,
Allah n'est pas obligé. Gisèle Prignitz, s'appuyant sur un ensemble
de textes, met en évidence deux mécanismes généraux
qui pourraient caractériser l'écriture de certains auteurs négro-africains
contemporains : la récupération et la subversion. Ces écrivains
sont en quelque sorte des bricoleurs littéraires. Ils recyclent les matériaux
hétéroclites et évolutifs que leur offre la langue française
post-coloniale. Les uvres ainsi réalisées sont des objets
hybrides où le français est détourné et plié
aux impératifs de l'oralité africaine, de son énonciation,
de sa sémantaxe. Le roman d'Hubert Freddy Ndong Mbeng Les Matitis
pourrait faire partie du corpus de Gisèle Prignitz. C'est un texte linguistiquement
hétérogène analysable en termes de récupération
et de subversion. Mais Cécile Van den Avenne s'intéresse à
la position énonciative de l'écrivain-passeur s'adressant à
un double public, gabonais francophone et francophone non gabonais. La position
incertaine - pour qui écrire ? - de cet auteur à la frontière
entre deux mondes se traduit par des jeux de déconstruction/construction
de stéréotypes et par la représentation dans le texte de
l'hétérogénéité qui le constitue.
Il
y a évidemment un monde entre Freddy Ndong Mbeng, lycéen librevillois
déscolarisé, écrivain débutant au statut incertain,
et Léopold Sédar Senghor, agrégé de l'Université
et écrivain majeur. Alors que l'enfant des matitis vit dans une
culture interstitielle, le chef d'Etat sénégalais et académicien
français se définit comme un métis culturel. Pour Pierre
Dumont, le métissage culturel tel que le conçoit Senghor n'est pas
une forme déguisée de sujétion aux normes dominantes occidentales.
Il ne s'agit pas d'esquiver les conflits mais d'en tirer profit : c'est parce
que l'écrivain maîtrise l'ensemble des matériaux qu'il utilise
qu'il peut produire un objet interculturel harmonieux. Par ailleurs, entre
les premiers écrits de Senghor et le roman de Freddy Ndong Mbeng, plus
d'un demi-siècle s'est écoulé et toute une littérature
s'est constituée. Bernard Zongo revisite l'histoire littéraire,
sociale et culturelle négro-africaine du vingtième siècle
en examinant la notion senghorienne de négritude d'un point de vue glottopolitique.
Concernant les conceptions de Senghor, Bernard Zongo est plus critique que Pierre
Dumont. De façon générale, il insiste sur les ambiguïtés
de la négritude, qui font que le concept peut être pris en charge,
à chaque époque, par des forces divergentes. Il montre aussi comment
l'histoire transforme peu à peu une force de novation en force de conservation.
Moussa Daff revient, à partir d'exemples sénégalais, sur
la façon dont l'écriture littéraire négro-africaine
s'est progressivement libérée des modèles hexagonaux. Il
voit dans cette évolution le passage d'une littérature qui se voulait
en français langue maternelle alors que le français était
une langue étrangère à une littérature décomplexée
qui s'assume comme écrite en français langue seconde.
Dans
la partie consacrée aux zones créolophones, on trouvera tout d'abord
trois études monographiques consacrées à un écrivain
et une uvre : Axel Gauvin et Train fou (C. Bavoux) ; Patrick Chamoiseau
et Texaco (C. Molinari) ; Ina Césaire et Mémoires d'Isles
(S. Bérard). Suivent deux études comparatives : entre les productions
littéraires martiniquaises et guadeloupéennes (N. Schon), mauriciennes
et antillaises (V. Magdelaine-Andrianjafitrimo). Claudine Bavoux aborde, à
propos des îles Mascareignes une question déjà étudiée
en Afrique noire, notamment par Moussa Daff : la mise en phase des pratiques littéraires
et des pratiques sociales et partant la possibilité d'une écriture
sans insécurité. Faisant une analyse linguistique du roman d'Axel
Gauvin Train fou, Claudine Bavoux met en évidence l'"intelligence"
de l'auteur, qui parvient à concilier l'endogène et l'exogène,
l'ancrage dans les réalités langagières réunionnaises
- français régional, créole - et l'inscription dans l'espace
francophone le plus large. Chiara Molinari poursuit à la Martinique
l'étude de la construction des identités créoles. Elle montre
comment Texaco, roman de Patrick Chamoiseau, met en scène l'élaboration
par les sujets créoles martiniquais d'un "espace et d'une langue rhizome"
à partir d'"un espace et d'une langue racine". Elle étudie
les mécanismes permettant la transposition écrite de cette "diversalité"
fondamentalement orale. Stéphanie Bérard étudie également
les rapports entre pratiques langagières et constructions identitaires
à la Martinique. Elle s'appuie sur la pièce Mémoires d'Isles,
où Ina Césaire fait parler deux personnages prototypiques. Aure,
l'ancienne institutrice est du côté de la langue-racine, du monolinguisme,
du français châtié, Hermance du côté de la langue-rhizome
et du métissage. Nathalie Schon, distingue la littérature guadeloupéenne
de la littérature martiniquaise. Tout en reconnaissant qu'il ne s'agit
là que de tendances générales, elle considère que
les deux littératures ont des approches différentes des rapports
entre le français et le créole : la littérature martiniquaise
est "créolisante", la littérature guadeloupéenne
est "française ou créole". Au-delà et en deçà
des pratiques littéraires, cela correspond, selon Nathalie Schon, à
deux "logiques" : confrontation des langues pour les Martiniquais, coexistence
des langues pour les Guadeloupéens. Adoptant une perspective plus large,
Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo ne fait pas cette distinction et oppose
la littérature mauricienne aux littératures antillaises, Martinique
et Guadeloupe confondues. Elle analyse les "nouvelles normes esthétiques
antillaises", qui conduisent à une "hétérogénéité
homogénéisée". Etudiant les cas particuliers que constituent
Carl de Souza Ananda Devi, Amal Sewtohul et Barlen Pyamootoo, elle montre comment
la littérature francophone de Maurice se démarque simultanément
des codes de la littérarité occidentale et de la littérarité
antillaise.
Quittant les zones créolophones pour l'Acadie, nous trouvons
une problématique analogue. En effet, pour s'affirmer, la littérature
acadienne doit également se distinguer d'une mère, la littérature
française, et d'une grande sur, la littérature québécoise.
Elle partage avec la littérature mauricienne la propriété
d'être en quelque sorte doublement périphérique. Annette et
Raoul Boudreau, s'appuyant à la fois sur des textes littéraires
et sur des entretiens, montrent comment, dans un même processus, émergent
en Acadie une littérature, une langue et une nation. Dans le dernier
article, Foued Laroussi revient, à propos de la littérature francophone
du Maghreb, sur le thème de l'altérité, que j'aborde dans
le premier article à partir de la littérature nègre - écrire
dans la langue de l'autre ? - mais avec un regard différent : j'essaie
de comprendre comment se met en place et perdure un processus de minoration, Foued
Laroussi s'interroge sur la possibilité d'y échapper. Regrettant
que la question de la langue conduise à occulter les vrais problèmes
et à masquer les qualités de la production littéraire du
Maghreb, il plaide pour un dépassement de "l'équation selon
laquelle français au Maghreb = héritage subi de la colonisation"
(p. 187). Claude Caitucoli
Bibliographie
GUESPIN L., MARCELLESI J.-B. (dirs.), 1986, "Pour la glottopolitique",
dans J.B. Marcellesi (dir.), Glottopolitique, LANGAGES, n° 83, pp.
5-31. WATZLAWICK P., BAVELAS J.-B., JACKSON D., 1972, Une logique de la
communication, Paris, Seuil.
Table des matières
Claude
Caitucoli : Présentation | 2 |
Claude Caitucoli : L'écrivain francophone
agent glottopolitique : l'exemple d'Ahmadou Kourouma |
6 | Gisèle
Prignitz : Récupération et subversion du français dans
la littérature contemporaine d'Afrique francophone : quelques exemples |
26 | Cécile
Van den Avenne : La position énonciative complexe d'un écrivain
d'Afrique francophone : le cas d'Hubert Freddy Ndong Mbeng |
44 | Pierre
Dumont : Du métissage à l'interculturel, itinéraire d'une
rencontre impossible, le cas Senghor | 60 |
Bernard Zongo : La négritude :
approche diachronique et glottopolitique | 67 |
Moussa Daff : Vers une francophonie africaine
de la copropriété et de la cogestion linguistique et littéraire |
88 | Claudine
Bavoux : Le partage de la langue dans Train fou d'Axel Gauvin |
96 | Chiara
Molinari : Réseau spatial et linguistique : le cas de Patrick Chamoiseau
| 109 |
Stéphanie Bérard : Créole
ou/et français : le multilinguisme dans Mémoires d'isles d'Ina Césaire
| 121 |
Nathalie Schon : Stratégies créoles.
Etude comparée des littératures martiniquaise et guadeloupéenne |
130 | Valérie
Magdelaine-Andrianjafitrimo : Une mise en scène de la diversité
linguistique : comment la littérature francophone mauricienne se dissocie-t-elle
des nouvelles normes antillaises ? | 141 |
Annette Boudreau, Raoul Boudreau : La
littérature comme moyen de reconquête de la parole. L'exemple de
l'Acadie | 165 |
Foued Laroussi : "Ecrire dans la
langue de l'autre ?" Quelques réflexions sur la littérature
francophone du Maghreb | 180 |
Compte rendu - Claude Frey : Suzanne
Lafage, Le lexique français de Côte d'Ivoire, appropriation et
créativité, tome 1 et tome 2. Le français en Afrique,
Revue du Réseau des Observatoires du Français Contemporain en Afrique
Noire, n° 16 et n° 17. Institut de Linguistique française - CNRS,
UMR 6039 - Nice -, 2003, 865 p. | 189 |
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: le cas des littératures francophones Téléchargement
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: L'écrivain francophone agent glottopolitique : l'exemple d'Ahmadou
Kourouma résumé |
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: Récupération et subversion du français dans la littérature
contemporaine d'Afrique francophone : quelques exemples résumé |
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: La position énonciative complexe d'un écrivain d'Afrique francophone
: le cas d'Hubert Freddy Ndong Mbeng résumé |
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Ko) | Pierre Dumont :
Du métissage à l'interculturel, itinéraire d'une rencontre
impossible, le cas Senghor résumé |
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Ko) | Bernard Zongo :
La négritude : approche diachronique et glottopolitique résumé |
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Ko) | Moussa Daff : Vers
une francophonie africaine de la copropriété et de la cogestion
linguistique et littéraire résumé |
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: Le partage de la langue dans Train fou d'Axel Gauvin
résumé |
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spatial et linguistique : le cas de Patrick Chamoiseau résumé |
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: Créole ou/et français : le multilinguisme dans Mémoires
d'isles d'Ina Césaire résumé |
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Ko) | Nathalie Schon : Stratégies
créoles. Etude comparée des littératures martiniquaise et
guadeloupéenne résumé |
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Ko) | Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo
: Une mise en scène de la diversité linguistique : comment la littérature
francophone mauricienne se dissocie-t-elle des nouvelles normes antillaises ?
résumé |
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Ko) | Annette Boudreau, Raoul
Boudreau : La littérature comme moyen de reconquête de la parole.
L'exemple de l'Acadie résumé |
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Ko) | Foued Laroussi :
"Ecrire dans la langue de l'autre ?" Quelques réflexions sur
la littérature francophone du Maghreb résumé |
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Ko) | Compte-rendu - Claude
Frey : Suzanne Lafage, Le lexique français de Côte d'Ivoire,
appropriation et créativité, tome 1 et tome 2. Le français
en Afrique, Revue du Réseau des Observatoires du Français Contemporain
en Afrique Noire, n° 16 et n° 17. Institut de Linguistique française
- CNRS, UMR 6039 - Nice -, 2003, 865 p. | .pdf
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Ko) |
Résumés
L'écrivain francophone
agent glottopolitique : l'exemple d'Ahmadou Kourouma par Claude Caitucoli
| Tout écrivain est de fait un
agent glottopolitique et, de ce point de vue, les écrivains dits "francophones"
sont, pour la plupart, particulièrement actifs, conscients et novateurs.
Avec Ahmadou Kourouma, on peut même parler de militantisme glottopolitique.
S'interrogeant sur ce qui fait la spécificité de la "littérature
nègre", Claude Caitucoli tente de montrer qu'elle réside dans
le regard que les instances de légitimation portent sur elle. La diversité
des productions littéraires nègres francophones sont alors analysables,
du point de vue de l'action sur la langue, comme des réponses variées
à un mécanisme général de minoration et d'insécurisation.
Ce principe est appliqué au cas particulier d'Ahmadou Kourouma dans son
dernier roman : Allah n'est pas obligé. Mots
clés : littérature nègre ; Ahmadou Kourouma ; minoration
; insécurisation ; glottopolitique.
Récupération
et subversion du français dans la littérature contemporaine d'Afrique
francophone : quelques exemples par Gisèle Prignitz | L'identité
francophone se construit dans un jeu complexe d'oppositions et de "styles"
revendiqués. Les "pratiques" francophones se manifestent à
travers des objets chargés de sens dont les productions littéraires
sont les plus visibles. Récupérant l'outil de "transfert"
qu'a été la langue française coloniale ou postcoloniale,
les auteurs africains révèlent leur virtuosité à tirer
parti d'un matériau évolutif ; ils se l'approprient en le pliant
aux impératifs de l'oralité africaine, de son énonciation,
de sa sémantaxe. Il se crée, dans ces oeuvres originales, une espèce
d'hybridité qui se pose en autoréférence dans sa variabilité
même. Mots clés : vernaculaire/véhiculaire
; africanismes ; norme endogène ; appropriation ; hybridité ; hybridation
; sémantaxe. .
La position énonciative
complexe d'un écrivain d'Afrique francophone : le cas d'Hubert Freddy Ndong
Mbeng par Cécile Van den Avenne | Cet
article rend compte des choix d'écritures du roman d'un jeune Gabonais,
Hubert Freddy Ndong Mbeng, intitulé Les Matitis, texte linguistiquement
hétérogène où se trouvent co-présents des discours,
des mots, des façons de dire appartenant à des espaces discursifs
différents, texte au genre incertain, entre documentaire et fiction, "récit
urbain" qui propose un parcours dans la Libreville de "derrière
les façades". Une des approches possibles de l'hétérogénéité
du texte est la position énonciative complexe de Ndong Mbeng, socialement
à la frontière entre deux mondes, et se faisant "passeur"
: jeune homme grandi dans les matitis, scolarisé jusqu'au lycée,
écrivant en français (qui est au Gabon langue officielle et langue
de l'enseignement, mais également langue véhiculaire en ville),
écrivant à la fois pour le Librevillois, le Gabonais, pouvant lire
ce texte en français, et pour un lecteur francophone non gabonais, ne connaissant
pas les réalités socio-économiques de Libreville. Textuellement,
on peut repérer l'inscription de cette position énonciative complexe
à travers les jeux de déconstruction/construction de stéréotypes
et d'autre part, à travers la représentation dans le texte de l'hétérogénéité
qui le constitue : guillemets, notes en bas de page, énoncés métadiscursifs,
insertion de discours rapportés. Mots clés
: Gabon ; Hubert Freddy Ndong Mbeng ; Les Matitis ; hétérogénéité
du texte ; écrivain-passeur.
Du métissage à
l'interculturel, itinéraire d'une rencontre impossible, le cas Senghor
par Pierre Dumont | Pierre Dumont
se penche, une nouvelle fois, sur l'énigme Senghor, tour à tour
adulé et décrié, chantre de la Négritude ou homme
de paille du néo-colonialisme. Mais au-delà de ce dialogue impossible,
il s'agit ici de replacer la Langue au cur de la définition du métissage
culturel analysé à travers ses productions par l'étude des
mots, des signes et des images. Loin de ne vouloir être qu'un gommage
des différences, toujours au profit des langues et des cultures dominantes,
le métissage se veut donc l'expression originale des conflits vécus
et surmontés. C'est sans doute cet aspect-là de l'uvre de
Senghor-précurseur que l'Histoire retiendra un jour. Mots
clés : Senghor, Négritude, métissage culturel.
La négritude : approche
diachronique et glottopolitique par Bernard Zongo | Balayant
l'ensemble du vingtième siècle, l'article revisite le concept de
négritude en le soumettant à l'analyse de la pratique glottopolitique.
Bernard Zongo montre qu'en définitive, de par la diversité de ses
sources, de par ses contextes complexes d'émergence et de re-formulation,
de par les idéologies autour desquelles elle a été forgée
ou soutenue, la négritude a toujours constitué une arme idéologique
au service de forces glottopolitiques - négro-américaines, américaines
blanches, négro-africaines, négro-antillaises, européennes
- aux intérêts contradictoires et même antagonistes. Mots
clés : négritude ; Senghor ; glottopolitique.
Vers une francophonie africaine
de la copropriété et de la cogestion linguistique et littéraire
par Moussa Daff | Nous nous proposons
dans ce texte de montrer comment, en l'espace de deux générations
de francophones d'éducation, les représentations liées à
la pureté et à la norme du français ont évolué.
L'évolution de la langue d'écriture peut se mesurer par l'importance
du recours à une écriture identitaire puisant sa source dans l'interculturel
africain francophone. Les écrivains africains de la nouvelle génération
revendiquent, dans l'écriture littéraire, la copropriété
et la cogestion linguistique dans l'espace francophone. Les particularités
lexicales du français qui émaillent leurs textes sont le signe d'une
appropriation du français qui a acquis le statut de langue seconde. Mots
clés : littérature francophone ; Sénégal ; appropriation
; français langue étrangère ; français langue seconde.
Le partage de la langue dans
Train fou d'Axel Gauvin par Claudine Bavoux | L'auteure
de cet article choisit de s'en tenir à une stricte approche linguistique
et, avant tout, lexicale, du texte littéraire. C'est par choix qu'elle
assimile le roman d'Axel Gauvin, Train fou, à un spécimen
de discours francophone. La mise à l'écart de l'évidente
dimension littéraire du texte, la non-prise en compte du style de l'écrivain,
répondent à une exigence de méthode et n'invalident évidemment
pas d'autres approches. L'auteure se propose, dans le contexte réunionnais,
et à la lumière des travaux linguistiques existants, d'analyser
la mise en uvre, par un écrivain, des ressources langagières
d'une situation à laquelle il participe comme acteur. Une conclusion s'impose
à la suite de ce travail pointilleux et quelque peu ingrat : le texte révèle
un écrivain qui, aux marges de l'espace francophone, là où
les phénomènes de variation se conjuguent à ceux du contact
diglossique, fait du français un outil de grande communication en même
temps qu'un moyen d'exprimer l'intime et le particulier, sans que soient érigés
en systèmes les usages vernaculaires. Il apparaît finalement
que l'action d'A. Gauvin va au-delà de la simple défense et illustration
d'un usage régional et qu'il fait preuve d'une audace évidente dans
la mise en uvre et dans le renouvellement de l'ensemble des matériaux
linguistiques qu'il utilise. Une attitude libre et constructive face aux normes
linguistiques lui permet de conjuguer l'endogène à l'exogène,
de dire la Réunion tout en participant à la construction d'un espace
linguistique plus vaste. Mots clés : Axel
Gauvin ; Train fou ; la Réunion ; endogène/exogène.
Réseau spatial et
linguistique : le cas de Patrick Chamoiseau par Chiara Molinari |
La présente étude se propose d'examiner les
relations qui existent entre la dimension linguistique et la quête identitaire
et spatiale à l'uvre dans l'aire créole telles qu'elles sont
décrites par l'écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau dans son
roman Texaco. Plus précisément, il sera question de porter
au premier plan le parcours entamé par les sujets créoles afin de
reconquérir l'espace, la langue et l'identité anéantis suite
au phénomène de colonisation. C'est en franchissant plusieurs
étapes (de l'espace et de la langue racine englobants et centralisateurs
à l'espace et à la langue émiettés et dispersés)
que les protagonistes de cette recherche parviennent à élaborer
un espace et une langue rhizome. Ceux-ci sont articulés selon un réseau
ouvert en mesure d'accueillir les composantes ethniques et linguistiques hétérogènes
qui participent de la créolisation et les liens croisés qui les
structurent, sans prétendre à l'homogénéisation.
Toutefois, dans la mesure où elle est caractérisée principalement
par des traits oraux, la langue rhizome se heurte inévitablement aux tentatives
de transcription écrite. En conséquence, il sera question de relever
les solutions d'écriture envisagées par l'écrivain afin d'opérer
la transition de la langue rhizome à la dimension écrite, ainsi
que leur valeur symbolique. Cette perspective d'analyse permettra de prouver que
la dimension linguistique peut être considérée comme une mise
en scène de la diversalité qui est au cur même de la
créolisation. Mots clés : Patrick
Chamoiseau ; Texaco ; diversalité ; langue racine ; langue rhizome.
Créole ou/et français
: le multilinguisme dans Mémoires d'isles d'Ina Césaire par
Stéphanie Bérard | Dans
sa pièce Mémoires d'Isles (1985), la dramaturge et ethnologue martiniquaise
Ina Césaire joue du choix des langues - français ou/et créole
- et de la variation des registres, en passant d'une langue soutenue et retenue
à une langue plus familière. Les personnages en scène, deux
vieilles Antillaises, Aure et Hermance, manifestent un rapport différent
aux langues : Aure, ancienne institutrice use d'un français extrêmement
châtié dans le plus pur respect des règles, alors que son
interlocutrice aux origines plus modestes, Hermance, recourt très souvent
au créole et modifie la langue française à loisir, la transfigure
pour mieux se l'approprier et la modeler en conformité avec sa perception
du monde et sa situation dans la société. Cette étude
se veut d'une part linguistique dans la mesure où elle analyse précisément
les utilisations respectives du créole et du français, et l'interaction
des deux langues au sein du dialogue théâtral ; nous verrons quand
et comment le créole est utilisé sans altérer la compréhension
d'un public non créolophone. Le français parlé par les deux
femmes diffère radicalement : Aure a adopté docilement la langue
française au contraire d'Hermance qui l'a remodelée dans l'utilisation
nouvelle de la grammaire, de la syntaxe et du vocabulaire. Cette étude
se veut d'autre part sociolinguistique : le rapport des deux femmes aux langues
est significatif de leur relation à la société et à
la culture. On a longtemps considéré le français comme langue
supérieure, valorisante par opposition au créole, langue supposée
inférieure et dégradante. Deux cas de figures distincts sont ici
présentés : Aure accepte le monolinguisme imposé pendant
longtemps par l'impérialisme colonial, ce qui témoigne d'une volonté
d'assimilation à la culture française ; Hermance au contraire manifeste,
à travers son usage du créole, une tentative de résistance
au modèle français et un désir d'affirmation dans la différence.
La pièce d'Ina Césaire tente de réhabiliter le créole
et de faire se conjuguer les langues, sans séparation nécessaire
du créole et du français, sans exclusion mutuelle : de cette
union heureuse naît un langage nouveau qui manifeste la différence
et exprime une identité irréductible à l'unicité,
une identité résolument créole, c'est-à-dire composite.
Mots clés : Littérature martiniquaise
; Ina Césaire ; Mémoires d'isles ; identité créole
; français et créole.
Stratégies créoles.
Etude comparée des littératures martiniquaise et guadeloupéenne
par Nathalie Schon | Dans presque
tous les romans martiniquais étudiés, la transgression linguistique,
intentionnelle ou non, exprime le rapport a-normal à la culture et donc
un potentiel subversif qui peine à se dégager du clivage dichotomique
: dominé-dominant. Le créole est perçu par ces auteurs comme
un vecteur d'authenticité, même si son opposition radicale au français
laisse deviner une ambiguïté, rejetée afin de mieux y remédier.
Nous avons vu que par "littérature créolisante", il faut
entendre une littérature qui entend placer le créole en position
centrale. La distinction entre une littérature martiniquaise créolisante
et guadeloupéenne française ou créole est confirmée
à travers leur rapport à l'institution, tel qu'il se reflète
dans l'écriture et notamment dans le choix de la langue ou des langues.
Il ne s'agit bien sûr que d'une tendance ; certains auteurs modifient quelque
peu leur vision de la littérature antillaise, car ils sont avant tout des
créateurs individuels. Le point commun entre ces auteurs est la thématisation
directe ou indirecte d'une insécurité culturelle, tantôt traitée
avec humour, violence ou détachement. L'auto-exotisme antillais semble
s'exprimer par un véritable jeu de masques culturel, dont les enjeux sont
également structurels. Mots clés : littérature
guadeloupéenne ; littérature martiniquaise ; littérature
créolisante ; insécurité culturelle.
Une mise en scène
de la diversité linguistique : comment la littérature francophone
mauricienne se dissocie-t-elle des nouvelles normes antillaises ? par Valérie
Magdelaine-Andrianjafitrimo | Dans
la société mauricienne cloisonnée dans ses langues de prestige
multiples, et surtout dans le "francotropisme", le créole n'a
que peu de part à la création littéraire. La complexité
de la situation linguistique mauricienne fait la difficulté, et les enjeux,
de définir cette littérature qui, aux problèmes communs à
l'ensemble des littératures émergentes, ajoute l'éclatement
de son champ en fonction des langues d'écriture choisies : langues dominantes
qui peuvent rattacher les uvres aux littératures canoniques des diverses
métropoles, française, anglaise, indienne, chinoise ; langue créole,
parfois confondue avec l'ensemble des autres créoles, réunis en
un abusif champ créole transinsulaire. L'autonomisation du champ mauricien
ne semble donc pas encore réalisée. Les apparitions du créole
jouent alors, dans la littérature francophone mauricienne, un rôle
radicalement différent de celui qui lui est octroyé dans la littérature
francophone antillaise où il se fait plus volontiers entendre et joue un
rôle idéologique en même temps que poétique prépondérant.
Plus rare, plus discret, il est utilisé, dans les dernières publications
romanesques de Devi, De Souza, Pyamootoo, Sewtohul, sous des formes tout à
fait différentes qui semblent rompre avec ce que les éditeurs, forts
du succès des écrivains antillais, tendent à privilégier
et ces textes proposent peut-être une forme de renouvellement de l'écriture
francophone. Il s'agit alors, pour nous, de problématiser les dispositifs
et la portée idéologique de ces modifications romanesques traduites
par un recours différent à la langue. La littérature francophone
mauricienne ne succombe pas aux sirènes identitaires qui font de la langue
l'équivalent d'une identité collective et l'on ne peut y retrouver
cette homogénéisation de l'hybridation des langues qui semble devenue
la seule garante d'une expression authentiquement créole. La littérature
mauricienne utilise le créole avant tout pour mettre en marche un travail
de déconstruction des cloisonnements identitaires dans des dispositifs
scénographiques qui tiennent à une redéfinition du sujet
énonciateur plus qu'à des pressions normatives. Si les premiers
romans de Carl de Souza se caractérisent par un recours appuyé à
quelques mauricianismes ostentatoires, ses autres uvres se retournent vers
une langue française hiératique, étrangement inadéquate
avec le réel décrit, ce qui constitue un univers onirique, aux marges
de ce que Ananda Devi nomme le "para-naturel". Chez cette dernière,
le créole joue un rôle de plus en plus visible : jouant des ressources
d'un français poétisé, le texte use du créole comme
d'une ressource poétique supplémentaire, permettant au français
de mettre en scène un dédoublement métaphorique, de s'enraciner
dans un fonds d'images renouvelées. Sewtohul et Pyamootoo font un recours
encore plus stratégique au créole, par son économie drastique
pour le second, par l'utilisation de la langue dans des chapitres entiers, mais
teintés d'ironie, pour le premier. La fiction s'accentue paradoxalement
de l'usage de la langue référentielle par excellence qu'est le créole
et qui, ici, creuse sa place glottopolitique en témoignant de l'individualisation
de l'énonciateur dans un langage qui manifeste sa vision désenchantée
du réel mauricien mais aussi, marque la fin de l'autocensure qui frappait
les créolophones. L'usage du créole mauricien semble contribuer
à construire l'isotopie centrale de la libération, et de ce fait,
permet à la littérature francophone de Maurice de se départir
des codes dominants de la littérarité occidentale et des codes de
la littérarité antillaise imposés par une vision trop homogénéisante
de l'identité et la culture créoles. Mots
clés : Littérature francophone de Maurice ; Devi ; De Souza
; Pyamootoo ; Sewtohul ; Littérarités mauricienne, antillaise, occidentale.
La littérature comme
moyen de reconquête de la parole. L'exemple de l'Acadie par Annette Boudreau
et Raoul Boudreau | La littérature
acadienne naît, comme toute littérature, par la création simultanée
d'une langue et d'une nation, en marquant sa différence d'avec la littérature
québécoise et la littérature française avec lesquelles
elle reste néanmoins attachée pour compenser les lacunes de ses
moyens limités. Les stratégies de légitimation de la langue
acadienne vont de la valorisation de son ancienneté en la rattachant aux
origines du français de France à la revendication graduée
de sa différence jusque dans l'emploi du parler bilingue actuel. Ces stratégies
variées ont en commun de contribuer à valoriser la langue et la
culture acadiennes et à construire une identité propre autour de
ces valeurs. En se constituant comme entité relativement autonome, la littérature
acadienne devient un outil privilégié de cette quête de légitimité
par rapport à soi-même et par rapport au monde extérieur dans
laquelle la société acadienne doit naviguer entre la singularisation
et l'ouverture au monde. Mots clés : Littérature
acadienne ; littérature, repésentations et pratiques linguistiques.
"Ecrire dans la langue
de l'autre ?" Quelques réflexions sur la littérature francophone
du Maghreb par Foued Laroussi | La
littérature maghrébine de langue française est tributaire
de l'actualité politique et culturelle du Maghreb et de l'histoire coloniale
propre à chaque pays. L'usage du singulier, dans ce texte, ne s'explique
donc que par sa commodité et ne prétend nullement minorer la diversité
qui la caractérise. Pendant longtemps, le débat autour de la
littérature maghrébine de langue française s'est polarisé
sur de la question de la langue. Il s'agit d'uvres produites en français,
une langue que certains désignent comme la langue de l'Autre. Dans ce texte,
il est question de montrer que ce débat s'est fait au détriment
des uvres elles-mêmes réduisant ainsi leurs dimensions et les
problématiques qu'elles traitent à un strict support linguistique.
Or cette littérature a toujours résisté aux pressions, car
elle se veut comme une quête permanente de réalités différentes,
comme un refus du cloisonnement dans lequel on veut l'enfermer. Aussi considérer
le français comme la langue de l'Autre au Maghreb n'est pas évident
pour tout le monde. Le Maghreb, source d'inspiration de cette littérature,
étant pluriel, ouvert et fait d'apports multiples, chacun a recours à
l'idiome dans lequel il se trouve à l'aise. La langue appartient à
celui qui l'utilise. Mots clés : Littérature
maghébine de langue française ; altérité.
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