Revue de sociolinguistique en ligne | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
N°28 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Sommaire
ISSN : 1769-7425 |
Épistémologie, action, intervention sociolinguistique par Didier de RobillardVersion complète de cet article : gpl28_00introduction.pdf (...) Le numéro 28 de Glottopol : contenu Clémentine Rubio, pour sa part, s’intéresse aux échanges possibles entre histoire et sociolinguistique. On sait que le sausurrisme (une certaine lecture de F. de Saussure qui a prédominé chez les linguistes) a cru nécessaire de distinguer linguistique historique et linguistique synchronique en pensant que ce divorce était indispensable pour instaurer une linguistique véritablement scientifique. Nombre de linguistes et sociolinguistes ont néanmoins persévéré dans la prise en compte de la dimension historique dans leurs travaux : les historiens des langues (F. Brunot), les dialectologues, mais parfois avec une certaine mauvaise conscience liée à la crainte que leurs travaux ne soient de ce fait pas vraiment scientifiques. C. Rubio s’applique dans son article à examiner de manière détaillée les différentes figures d’une sorte de ballet entre sociolinguistique et histoire, selon différentes façons pour ces deux disciplines de s’apparier, en imaginant les conséquences que cela peut avoir pour l’une et l’autre discipline ou spécialité. Cette jeune chercheure s’appuie pour cela sur un objectif qui justifie que l’on s’attarde sur cette réflexion, puisqu’elle part de préoccupations liées à un terrain délicat, qui est celui des politiques linguistiques de la France en direction de « la Palestine ». Les multiples figures successives de « la Palestine » dans l’histoire, selon les points de vue différents, rend en effet quasi obligatoire une perspective historique dans cette recherche sociolinguistique, et donc les rapports de l’histoire avec la sociolinguistique, ce que C. Rubio a jugé nécessaire d’examiner ici de manière soigneuse. Dans une veine comparable, Véronique Castellotti réfléchit au « compagnonnage » entre certains courants de la didactique des langues et cultures et la sociolinguistique, aux influences réciproques que ces domaines ont pu exercer l’une sur l’autre. Elle insiste ainsi sur des différences institutionnelles (les sociolinguistes constituent longtemps un groupe peu organisé et institutionnalisé, alors que les didacticiens du FLE participent à des institutions), de focalisation (la sociolinguistique s’organise d’abord comme domaine de recherche, la didactique des langues prioritairement comme pratique d’intervention). Ce qui a néanmoins rassemblé ces spécialités, à savoir la question des contacts de langues et du plurilinguisme, n’a pas empêché des différences dans la façon de traiter ces questions, les didactologues insistant sur la standardisation indispensable selon eux à l’enseignement des langues, alors que les sociolinguistes tendaient à privilégier l’hétérogénéité. Ce texte aboutit à un renversement de perspective en conclusion, l’auteure constatant que ces différences ne peuvent cacher que les deux disciplines ont constamment privilégié le versant « production » de l’activité langagière, la composante « réception » demeurant le parent pauvre, perspective que souhaite approfondir V. Castellotti. Dans les trois articles précédemment évoqués, comme dans d’autres textes de ce numéro, la comparaison est à l’œuvre, comme souvent, au moins implicitement, dans les sciences humaines. Dominique Pichard Doustin s’interroge sur ce processus extrêmement commun, banal et donc peu problématisé car relevant d’une sorte d’impensé. Dans la mesure où elle se propose de comparer le sort fait aux langues étrangères dans l’éducation professionnelle dans trois pays (France, Espagne, Allemagne), la comparaison se trouve au cœur de sa recherche, ce qui l’a conduite à y réfléchir explicitement pour mieux agir. En tirant parti des travaux fort injustement méconnus de Guy Jucquois sur la pratique de la comparaison dans les sciences, notamment humaines, et notamment en linguistique, elle propose quelques éléments de réflexion concernant la comparaison et les conditions dans lesquelles elle peut légitimement se voir mise en œuvre. Ce bouquet de notions de base est ouvert dans une autre direction par le travail de Gilbert Daouaga Samari concernant la notion de « langue maternelle ». Son observatoire est constitué par l’usage fait de ce terme au Cameroun. Il commence par en montrer la grande diversité d’usages un peu contradictoires, pour ensuite argumenter que cette diversité correspond à des objectifs pragmatiques poursuivis par les chercheurs, ce qui, d’une certaine façon, répond comme en écho, à la question posée par R. Tirvassen sur la spécificité du travail de recherche ou du domaine de la recherche. En conséquence, et pour éviter cette cacophonie dans les définitions, l’auteur propose, pour réfléchir à la notion de L1, de substituer au point de vue des chercheurs et à leurs objectifs, perspective qui prédomine actuellement, le point de vue des locuteurs eux-mêmes. Enfin, pour clore ce qu’on pourrait considérer comme l’une des deux veines principales de ce numéro, Shameem Oozeerally se saisit de la question du bhojpuri mauricien pour interroger la notion même de « langue », pilier, concept emblématique pour la linguistique et la sociolinguistique. Il mise sur sa connaissance du bhojpuri, langue minoritaire et en cours de régression ou d’étiolement, en en faisant une sorte de « cas-limite » qui permet de s’interroger sur ce qu’est une langue. Il se fonde sur les travaux concernant les « systèmes dissipatifs » pour essayer de tracer une perspective nouvelle en imaginant les langues dans de type de modélisation.
Pour ce qui concerne les articles, le reste du numéro est consacré à cinq textes convergents, qui sont les versions écrites d’interventions à un panel organisé lors du congrès du Réseau francophone de sociolinguistique (en 2015, à Grenoble). Ces textes travaillent à présenter différents aspects de courants intellectuels dont l’existence en sciences humaines est assez paradoxale. En effet, ces courants ont été animés par des personnalités intellectuelles parmi les plus importantes du vingtième siècle en Europe (W. Dilthey, M. Heidegger, H.-G. Gadamer, M. Merleau-Ponty, P. Ricoeur), ont influencé plus d’un intellectuel (M. de Certeau, M. Foucault…), et, on pourrait donc s’attendre à ce qu’ils aient exercé une influence notable dans les sciences humaines et sociales. Il n’en est rien, car, de manière assez énigmatique, ces courants n’ont connu que peu de tentatives de transpositions dans les sciences humaines, peut-être parce qu’ils interrogent les sciences humaines et sociales de manière trop fondamentale. Marc Debono, partant de l’idée que l’un des objectifs des SHS est de « comprendre » les autres, compare donc, face à cet impératif de « compréhension », deux grands ensembles, les courants pragmato-cybernétiques d’une part, et ceux se réclamant des mouvances phénoménologiques et herméneutiques de l’autre. Il en dégage en conclusion, aspect crucial de son article, des conséquences éthiques et politiques pour des sciences humaines et sociales, et donc pour la sociolinguistique, en montrant que des choix théoriques, loin d’être des décisions d’ordre technique sur lesquelles viennent se greffer des considérations éthiques et politiques sont d’abord et essentiellement, des choix éthiques et politiques qui, ensuite, et ensuite seulement, permettent des pratiques, des usages méthodologiques, etc. Isabelle Pierozak, pour sa part, se fonde sur le phénomène saillant des « citations » de corpus, de témoignages, dans les SHS, en tant qu’élément de légitimation épistémologique des travaux de recherche. Elle se demande donc, en somme, et pour paraphraser P. Bourdieu, « ce que citer veut dire », et surtout s’interroge sur le type et la qualité de légitimation qu’apportent les citations, en mobilisant divers auteurs, pour certains rarement mobilisés par les sociolinguistes. Cet article débouche sur l’idée que du statut épistémologique de la citation dépend la conception de la professionnalité du chercheur, si, comme elle l’argumente en s’appuyant sur A. Compagnon, le chercheur est bien plus impliqué dans le travail de la citation qu’on ne l’admet le plus souvent.
L’interrogation de R. Tirvassen sur la spécificité des discours scientifiques et de recherche trouve un éclairage différent sous la plume de Valentin Feussi. Il se demande quelles sont les relations entre le « croire » et le « savoir », et si la distinction catégorique communément admise va autant de soi qu’on le prétend. En se fondant sur des travaux des courants phénoménologiques-herméneutiques, il parvient à une stimulante conclusion dont je laisse le plaisir de la découverte au lecteur.
Trois compte-rendus de lectures complètent opportunément ce numéro.
Générique de fin Enfin, je voudrais remercier toutes celles et ceux qui ont contribué à ce numéro. Des treize propositions initialement reçues, onze ont été retenues, et deux écartées pour des raisons diverses qui n’ont rien à voir avec la pertinence de ces textes. Je ne doute pas que, si le calendrier l’avait permis, ce numéro aurait pu comporter l’ensemble de ces textes. Pour ce qui concerne les auteurs des textes publiés, il faut les remercier de leur ponctualité, et de l’énorme travail de refonte des textes que beaucoup ont réalisé à l’issue des arbitrages initiaux en vue d’améliorer les textes. En effet, compte tenu de la relative nouveauté du thème de ce numéro, les arbitres ont, légitimement, été très exigeants quant à la lisibilité des textes, réclamant explicitations, ré-écritures, coupes claires et notes de bas de page, ce à quoi les auteurs se sont employés de bonne grâce. Sommaire
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Résumés
Si de nombreux chercheurs, interpelés par l’apport de leur discipline au bien-être des populations, en particulier celles des pays les moins avancés, considèrent que les réflexions sur la problématique du langage dans le secteur éducatif sont centrales à leurs travaux, d’un point de vue heuristique, ces réflexions posent de manière cruciale la question de la validité de la théorisation dans la recherche sociolinguistique. C’est en tout cas ce qu’abordera cet article. Il se donne pour objectif d’interroger un des postulats dominants sur lequel repose le discours scientifique en sociolinguistique et, peut-être, dans l’ensemble des sciences sociales. On sait que de nombreux chercheurs attribuent une valeur de vérité générale à la théorisation opérée dans les sciences sociales. C’est d’ailleurs ce que fait, de manière explicite, W. Labov quand, dans l’affaire Ann Arbor, il affirme que « expert testimony is not a partisan matter ». Cette posture a de nombreuses implications épistémologiques et éthiques qui seront décortiquées dans l’article. A cet égard, il me paraît judicieux de m’appuyer sur le débat autour de la question du langage en contexte éducatif en me centrant sur les critiques de Labov contre le point de vue de Bernstein, les arguments exposés dans le procès Ann Arbor et, enfin, les critiques de Gumperz contre les réflexions de Labov. En filigrane de cette réflexion, il s’agit de se demander si les significations construites autour de phénomènes sociaux relèvent d’une simple application des outils de la science.
Si plusieurs auteurs ont réfléchi à ce que les méthodes sociolinguistiques pouvaient apporter à l’histoire de la langue, on s’intéressera ici davantage à ce que, dans un mouvement inverse, la dimension historique peut apporter à la sociolinguistique. On verra que la façon même de définir la sociolinguistique historique répond à des projets qui diffèrent de façon importante, ce qui soulève des enjeux, notamment disciplinaires, majeurs. Cette communication propose un état des lieux de ce qui, en sociolinguistique, serait relatif à ces questions, et une esquisse de réflexion sur l’utilité, les ressources et les transferts possibles d’autres disciplines (notamment en provenance de l’historiographie) vers une sociolinguistique historique. Elle interrogera les enjeux de cet outil d’analyse des langues (et des rapports aux langues) qu’est la sociolinguistique historique. On interrogera en définitive comment la sociolinguistique peut s’enrichir du paradigme historique pour l’analyse de processus liés aux langues dans leur complexité sociohistorique. Mots clés : Sociolinguistique historique. Epistémologie. Histoire.
Depuis l’émergence puis l’instauration d’un domaine de recherche francophone (et plus particulièrement français) en didactologie-didactique des langues (DDdL) soit, approximativement, depuis les années 1970, certaines « idées sociolinguistiques » occupent peu à peu une place grandissante dans la réflexion des chercheurs de ce domaine et dans la vulgate qui en découle. En revisitant brièvement cette période et en proposant une interprétation des principaux héritages et évolutions des deux secteurs, ce texte approfondira un point de contraste / confrontation plus particulier sur les questions de langue(s), variation et plurilinguisme(s), pour tenter de réfléchir aux relations entre ces deux secteurs et d’interpréter les circulations qui les caractérisent. Mots clés : sociolinguistique, didactologie-didactique des langues, appropriation, réception, contacts de langues
Je m’interroge dans cet article sur la comparaison selon une perspective herméneutique qualitative, dans la mesure où mon projet de thèse m’amène à comparer les politiques éducatives linguistiques mises en œuvre dans les formations générales et professionnelles dans trois espaces géographiques européens qui présentent des divergences notamment au niveau de leurs situations politiques et des contextes, dans lesquels les politiques linguistiques éducatives ciblées sont mises en œuvre. En effet, il m’a paru pertinent dès la construction de mon projet de recherche de m’interroger, en m’appuyant sur les apports théoriques construits notamment par Jucquois, Werner et Zimmermann, sur la posture à adopter au long du travail, sur la mise en œuvre du travail comparatif, ainsi que sur sa mise en scène et son écriture. L’accent est mis sur l’importance de la réflexivité, de l’historicisation, le rapport à l’altérité, la multiplicité des points de vue et l’écriture perçue en tant que co-constructrice de la recherche. Mots clés : Comparatisme, croisement, herméneutique, réflexivité, écriture.
L’une des marques fondamentales de la notion de « langue maternelle » est son caractère ambigu. Elle est d’une complexité sémantique telle que de récents travaux, surtout ceux menés à l’échelon international, reconnaissent qu’elle n’est pas opératoire en contexte plurilingue. Pourtant, dans un pays sociolinguistiquement fort complexe comme le Cameroun, elle continue de faire florès, du moins dans le discours des sociolinguistes et didactologues de langues en l’occurrence. Seulement, le recours à cette notion au « flou sémantique avéré » renseigne sur la volonté de certains chercheurs de surfer sur cette absence de clarté dans le sens (savamment ou inconsciemment orchestrée) pour en faire des usages stratégiques donnant souvent lieu à des interprétations problématiques sinon contradictoires. Ce problème découle non seulement de l’ambiguïté même de cette notion, mais aussi et surtout de la posture épistémologique adoptée par plus d’un pour caractériser la langue maternelle des Camerounais. Mots clés : Langue maternelle, épistémologie, catégorisations, ambiguïté, critères définitoires
S’inscrivant dans une logique de reconfiguration épistémologique dans le « domaine » des sciences du langage, cette communication a pour but d’apporter une réflexion autour de la situation du bhojpuri de Maurice en partant d’une application des théories alternatives, voire altéristes qui font traditionnellement partie des sciences dites dures. Nous proposons, à travers les loupes intrinsèquement multiples de ce que Morin (2008) appelle « la pensée écologisée », laquelle relève du moins en partie de l’écologie radicale (Robillard, 2008) et des théories de la complexité, d’aborder l’évolution historique du bhojpuri de Maurice avec une perspective rétro-anticipatrice. En effet, nous proposons de mettre à contribution deux aspects de l’historicité. D’abord, nous considérons le bhojpuri comme phénomène ICH, c'est-à-dire instable, contextualisé, hétérogène et historicisé (Robillard, 2008). Ensuite, notre approche, fondée sur ce que Robillard (ibid.) appelle « rétro-anticipation », condense une double dimension historique. D’une part, elle implique l’historicité du chercheur, en tant « qu’individu socialisé [qui] se construit de manière radicalement écologique […] avec les autres, avec son environnement, et cette relation est instable, relation dont le sens ne peut s’expliciter que par un effort réflexif qui consiste à relire l’histoire et à se relier à ce qui n’est pas soi (altéro-réflexivité), à l’avenir (rétro-anticipation) pour produire du sens » (Robillard, 2007 : 39). En même temps, le chercheur se construit d’une manière rétroactive selon son inscription dans la matrice dynamique de la connaissance (Morin, 2008 ; Jaccard et Jacoby, 2010). D’autre part, elle implique l’historicité associée au corpus et au « terrain ». En prenant principalement appui sur le travail de Stein (1982), lequel constitue notre « corpus », nous proposons d’analyser l’évolution du bhojpuri de Maurice, implanté à Maurice à partir de 1835, date de l’abolition de l’esclavage, événement qui a engendré un nombre de bouleversements importants dans le paysage (socio)linguistique local. Autrefois langue à forte portée véhicularisante, le bhojpuri est aujourd’hui une langue en danger de disparition. En effet, selon le recensement 2011, il n’y aurait que 5.3% de la population mauricienne qui parlerait le bhojpuri, ce qui équivaut à une baisse de 6.8% en 10 ans (Oozeerally, 2013). Ainsi, à partir d’un survol d’un nombre de faits (socio)historiques relatifs au bhojpuri de Maurice, notamment sur la question des représentations, nous proposons une réflexion épistémique-théorique qui aboutit à une conceptualisation autre des « langues », qui seraient analogues à des systèmes dissipatifs, lesquels ouvrent des perspectives alternatives dans la manière dont les pratiques linguistiques peuvent être conçues. Mots-clés : sciences du langage, épistémologie, rétro-anticipation, bhojpuri, Maurice
L’auteur argumente l’utilité et la nécessité d’une recherche d’autres perspectives épistémologiques que celles qui sont actuellement dominantes en sociolinguistique, et qui sont, paradoxalement pour des démarches étudiant la diversité humaine, assez homogènes car partageant des fondements largement analogues. Il s’attache ensuite à poser les principaux éléments d’une sociolinguistique de la réception d’inspiration phénoménologique-herméneutique, ces démarches inscrivant la diversité dans la problématisation même de l’être humain et par conséquent dans celle des sciences humaines. Il commence donc par en rappeler les arrière-plans généraux, puis ceux concernant le sens, ce qui inclut, centralement, la question de l’antéprédicatif, question sociolinguistique s’il en est. Il termine en montrant en quoi le travail herméneutique est différent des démarches majoritaires, et néanmoins indispensable de plusieurs points de vue : épistémologique, politique, éthique, pour que les sciences humaines deviennent intégralement « humaines ». Mots-clés : Epistémologie – Phénoménologie – Herméneutique – Sociolinguistique - Sens
Ce texte met en regard deux grandes conceptions de la réception - dans les courants pragmatistes/cybernétiques d’une part et phénoménologiques/herméneutiques d’autre part - dans l’espoir d’en tirer des éclairages pour l’histoire des idées sociolinguistiques. La première conception sera examinée à travers deux influences majeures qui innervent la sociolinguistique (dans sa version francophone/d’expression française) : la théorie des actes de langage et la formalisation jakobsonienne de la communication, deux influences bien sûr interprétées et ré-interprétées à de multiples reprises, en particulier par les courants de l’ethnographie de la communication et de l’analyse des interactions verbales. En contraste de cette première conception laissant peu de place à l’idée de réception, la vision herméneutique des « langues/langages/discours » est radicalement différente en ce qu’elle accorde une importance primordiale à la réception (ou interprétation/compréhension). La question découlant de cette comparaison étant de voir ce que cela change/peut changer d’envisager l’économie des échanges linguistiques par un bout plutôt que par l’autre ? Quels enjeux/conséquences à se focaliser, en sociolinguistique, sur la production plutôt que sur la réception ? Ces réflexions épistémologiques, sur des idées sociolinguistiques et leur histoire, ne sont pas neutres : la formalisation de la communication entre émission et réception pose aussi une question éthico-politique, celle de la place du débat sur le sens, de son contrôle. Mots-clés : réception, sociolinguistique francophone, épistémologie, herméneutique, pragmatique, schéma de la communication.
Dans ce texte sont questionnés les processus à l’œuvre dans la « réception / production » scientifique, concernant en particulier le travail qu’opère le sociolinguiste, ou plus exactement ce qui travaille ce dernier, aussi bien à l’égard des dires de ses témoins, qu’à l’égard des réflexions de ses pairs. En effet ces deux sources altéro-réflexives sont à considérer comme des phénomènes de même intérêt, et leur « traitement » / « travail », ante(« re »)production, est à questionner. Un point de départ stimulant pour cette réflexion se trouve chez A. Compagnon (1979) concernant le travail de la citation, qui portera ici sur les « matériaux » / « phénomènes » pré-cités. La présente problématique vise ainsi à montrer l’importance du travail s’opérant en réception dans l’imaginaire, travail qui engage le sociolinguiste, au-delà du scientifique, et qui n’est guère réfléchi pleinement dans ses enjeux et conséquences. Mots clés :Sociolinguistique de la / en réception ; compréhension ; professionnalité ; témoins / pairs ; relation ; altéro-réflexivité ; (travail de la) citation ; écriture de la recherche ; appropriation ; épistémologie /philosophie ; phénoménologie-herméneutiques.
Dans le champ des sciences humaines, la notion de croyance est pertinente dans les processus d’élaboration de connaissances. Il ne s’agit pas de s’inscrire dans l’opposition classique entre la foi (religieuse) et le « savoir » caractéristique des sciences objectives, qui fonde prioritairement le sens sur des aspects sémiotiques. Cette contribution vise à problématiser un croire différent, « originaire » (Romano, 2010), qui valorise plutôt la sensibilité et l’expérience du monde comme fondement du sens. Il repose sur des perspectives phénoménologiques et herméneutiques (Merleau-Ponty, 1947 et 1964 ; Romano, 2010) qui postulent le rapport fondamental, la participation immédiate de l’homme au monde comme condition du sens. Privilégier cette forme de croyance revient à valoriser le régime de la réception, vu que le sens est reçu d’expériences du monde. Le sens apparaît donc comme un phénomène pré-linguistique dont certains aspects peuvent être mis en signes, mais bien après la compréhension. Cette posture consiste à ramer à contre-courant des approches dominantes en sociolinguistique, puisqu’il s’agit alors de postuler des « langues » (sans signes) comme processus qui s’élaborent sous l’angle poïétique. Mots clés : croyance – sensibilité – expériences – historialité – « L »
L’auteur ouvre dans ce texte une discussion critique résolument épistémologique avec certaines approches sociolinguistiques ayant intégré quelques apports des orientations phénoménologiques-herméneutiques (PH). Il tente, d’abord, de lever quelques obstacles qui hypothèquent le dialogue possible entre la sociolinguistique et la philosophie. Et vise ensuite d’une part, à rendre compte, de façon synthétique, de certaines implications des orientations (PH) pour la sociolinguistique en s’appuyant sur des exemples précis pris, à la fois, aux travaux de quelques sociolinguistes et à sa propre expérience. D’autre part, il interroge quelques-unes des limites de ces courants en ciblant des points aveugles qu’il essaie d’éclairer avant d’esquisser quelques pistes éthiques, à titre de défis épistémologiques qui se posent à la sociolinguistique aujourd’hui. Mots-clés : Epistémologie- phénoménologie-herméneutique- sociolinguistique – expérience- compréhension- éthique - différence
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